Les principaux dispositifs de transition emploi-retraite
Dans le système de retraite français, outre la surcote, incitation financière au recul de l’âge de départ à la retraite (cf. indicateur n°1-9), deux dispositifs visent à favoriser l’activité des seniors.
Le cumul emploi-retraite donne la possibilité aux retraités de reprendre une activité et de cumuler alors les revenus issus de celle-ci avec leur pension. La retraite progressive permet à un assuré en fin de carrière de bénéficier partiellement de sa retraite tout en poursuivant son activité professionnelle à temps partiel. Le cumul emploi-retraite apparaît actuellement comme le dispositif incitatif à la prolongation de l’activité privilégié par les assurés.
Le cumul emploi-retraite (CER) offre aux retraités la possibilité de cumuler une pension de retraite avec des revenus d’activité. Si l’assuré a fait valoir l’ensemble de ses pensions légalement obligatoires et réunit les conditions pour obtenir le taux plein, il peut cumuler intégralement sa pension avec ses revenus d’activité : il s’agit du dispositif du CER dit « libéralisé ». Si ces conditions ne sont pas remplies, le cumul est en revanche plafonné et soumis à des critères qui varient selon le régime, on parle alors de CER « plafonné ». Pour les dernières évolutions dans le cadre de la réforme de 2023, voir l’encadré méthodologique. Selon l’Enquête Emploi en continu de l’Insee, 495 000 assurés cumulaient une situation d’emploi et une retraite en 2020, tous régimes confondus. Ces assurés ne sont cependant pas tous en CER, les assurés en retraite progressive entrant également dans le champ de cette définition. Des données de la Drees montrent que l’essentiel des assurés en CER sont affiliés à la Cnav qui était également leur régime principal avant la retraite (cf. Tableau 1). Parmi la génération 1946, 61 % des assurés en situation de CER étaient des assurés du régime général (Cnav) avant et pendant la retraite. 8,4 % de l’ensemble des retraités de cette génération a donc bénéficié d’un CER intra-régime Cnav. Les assurés qui sont affiliés, pour leur reprise d’activité, à un régime différent de celui dont ils dépendaient avant leur retraite représentent 36 % de l’ensemble des bénéficiaires du CER de cette même génération.
Tableau 1 ● Part des retraités nés en 1950 ayant cumulé un emploi et une retraite, selon le régime principal de retraite et d’emploi
Source : EIR 2016 – Drees. Repris de Drees (2021), "Les retraités et les retraites".
Champ : Retraités de droit direct d'un régime de base, nés en 1950, ayant liquidé un droit à retraite en 2011 ou avant, résidant en France ou à l'étranger, vivants au 31 décembre 2012
Note de lecture : 13,4 % des retraités de la fonction publique nés en 1950 et ayant liquidé un droit direct en 2015 ou avant (c’est-à-dire à 65 ans ou avant) ont cumulé, pendant une année au moins entre l’année qui suit le départ à la retraite et l’année des 66 ans, une retraite dans la fonction publique avec un emploi salarié dans le privé (CNAV). Cela représente 89 % des cumul des retraités de la fonction publique. Si un retraité cumule un emploi avec une retraite d'un même régime, mais également avec une retraite d'un autre régime, alors la dimension inter-régimes est privilégiée.
Graphique 1 ● Retraités du régime général en cumul emploi-retraite en tant que salariés du privé
Source : Cnav, base cumul 2009-2021.
Champ : Retraités du RG, en cumul emploi-retraite en N comme salarié du privé. Les retraités du RG avec une activité de TI ne sont pas inclus.
Depuis 2020, les salariés du secteur privé et les travailleurs indépendants sont réunis au sein d’un même régime, le régime général. La définition du champ des cumulants a donc évolué (cf précisions méthodologiques). Le statut de cumulant est à présent défini de façon similaire, que le retraité du régime général, quelle que soit son activité passée, reprenne en tant que travailleur indépendant (TI) ou salarié du privé (TS) (Tableau 2).
Un retraité est alors considéré comme cumulant l’année N s’il est en activité (TS et/ou TI) et que la date d’effet de sa pension de droit propre est antérieure ou égale à l’année N.
En 2020, 431 100 retraités du RG sont actifs en tant que salariés du privé (cumulants RG-TS). L’écart avec les effectifs présentés dans l’exercice précédent s’explique par le changement de méthodologie, et principalement par la prise en compte des assurés ayant liquidé leur pension et repris une activité en N.
Malgré la modification de la définition du cumul, l’évolution des effectifs n’est que peu modifiée (cf. Graphique 1, cf. Repss 2022 pour la comparaison). La diminution de 4 % constatée par rapport à 2019 est liée à la baisse des effectifs de nouveaux retraités car une part importante des nouveaux cumulants sont des retraités des années N, N-1 et N-2. Parmi les cumulants travailleurs salariés du régime général de 2020, il y a quasiment autant de femmes que d’hommes. 1 % ont moins de 62 ans, 88 % ont entre 62 et 74 ans et 11 % ont plus de 75 ans. Le salaire moyen annuel brut perçu au cours de l’année 2020 est de 12 200€ pour les hommes (soit 30 % du plafond de la sécurité sociale) et de 7 500€ pour les femmes (soit 18% du plafond de la sécurité sociale). Les montants annuels de pension tous régimes sont de l’ordre de 26 500€ pour les hommes et 16 000€ pour les femmes.
En 2020, 157 100 retraités du régime général (anciens travailleurs salariés et indépendants) étaient également actifs en tant qu’artisans ou commerçants. Hors professions libérales réglementées, le nombre d’actifs TI en cumul emploi-retraite a continué d’augmenter en 2020. Ces assurés sont en très grande majorité des hommes (72 %). Les retraités cumulant leur pension de retraite du régime général avec une activité indépendante en tant qu’autoentrepreneurs perçoivent, en moyenne, des revenus d’activité inférieurs à ceux qui ont le statut de travailleur indépendant de droit commun (4 800€ contre 19 800€).
Au total, en 2020, près de 590 000 pensionnés de droit propre du régime général (au titre d’une activité passée de salariés du privé, de travailleurs indépendants ou des deux) sont en cumul emploi-retraite. De l’ordre de 8 700 sont actifs à la fois en tant que travailleurs salariés et en tant que travailleurs indépendants. Il s’agit à 72 % d’assurés qui ont le statut d’autoentrepreneurs. La plupart (80 %) ont liquidé leur pension de droit propre au régime général après 2015 et donc n’acquièrent pas de droit à pension (cf. évolutions législatives).
En matière de cumul emploi-retraite, les règles appliquées aux salariés agricoles sont les mêmes qu’au régime général. Pour les non-salariés agricoles, le cumul emploi retraite libéralisé (intra-régime) est possible depuis janvier 2009 sous les mêmes conditions que les autres régimes et est assorti de quelques conditions favorisant l’installation des jeunes agriculteurs. A la MSA, environ 76 200 assurés ont bénéficié du dispositif en 2021 : 25 800 cotisants exploitants agricoles et 50 400 salariés agricoles percevaient une retraite de la MSA (cf. tableau 3).
Dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière (FPT et FPH), 45 100 assurés ayant liquidé leur pension à la CNRACL entre 2004 et 2011 (soit 11 % des retraités de la CNRACL ayant liquidé leur pension depuis 2004) exerçant en 2012 étaient affiliés à la Cnav et/ou à l’Ircantec et/ou à la Carpimko au titre d’une activité (cf. tableau 4). Enfin, dans la fonction publique d’État (FPE y compris militaires), on dénombrait 4 500 bénéficiaires d’un cumul emploi-retraite inter-régime en 2013.
Tableau 2 ● Cumul emploi retraite des retraités du régime général et/ou de l’ex-SSI – actifs en tant que travailleurs salariés (TS) du privé et/ou travailleurs indépendants (TI)
Source : Cnav, ex-RSI.
Remarque : De 2008 à 2018, le suivi des retraités actifs travailleurs indépendants portait sur les artisans, les commerçants et sur les professions libérales réglementées. A partir de 2020*, seuls les artisans et commerçants sont comptabilisés en tant que travailleurs indépendants.
Note : Chiffres arrondis à la centaine près.
Tableau 3 ● Adhérents de la MSA à la fois retraités et cotisants
Source : MSA.
Champ: Retraités de la MSA ayant pris leur retraite en N-1 ou avant et cotisant en N.
Tableau 4 ● Retraités de la CNRACL en cumul emploi-retraite
Source : base cumul Carpimko- Cnav-CNRACL-Ircantec, 2012.
Champ: Retraités de la CNRACL ayant pris leur retraite entre 2004 et 2011 et cotisant en 2012.
Sources des données
Cnav, MSA, CNRACL, Ircantec.
Suivi des retraités du régime général qui reprennent une activité en tant que salariés du privé
Le changement de méthodologie lié à l’harmonisation de la définition du statut de cumulants entre les retraités du régime général qui reprennent une activité en tant que salarié du privé ou en tant que travailleurs indépendants modifie le nombre de cumulants retenus pour une année donnée.
Une partie de l’écart avec les précédentes éditions des Repss concerne des assurés qui sont en retraite progressive. Jusqu’aux Repss du PLFSS pour 2022, un assuré en retraite progressive était repéré comme tel et n’était pas pris en compte même si, à l’issue de la liquidation définitive de sa pension, il reprenait une activité en tant que cumulant. Cette situation est désormais distinguée. Cela concerne 2 410 assurés.
De plus, la nouvelle méthodologie, réalisée sur des données arrêtées à la fin de l’année n-1, permet d’identifier les nouveaux retraités de n-2 ayant débuté un cumul en n-2 (40 000 assurés en 2020). L’information sur les nouveaux cumulants de n-1 n’est pas encore correctement alimentée dans le système d’information statistique au moment de l’édition du rapport.
Enfin, si la méthodologie mise en œuvre à compter de 2020 prend en compte plus d’assurés, en particulier les nouveaux retraités de l’année ou les assurés décédés en cours d’année (1 860), les contraintes imposées sur les dates conduisent à ne pas retenir des assurés qui auparavant étaient comptabilisés.
Avec la méthodologie précédente, l’information pour les salaires sur laquelle reposait la détermination des cumulants était le report annuel de salaire sur le compte de l’assuré. Ce report ne permettait pas de distinguer si le montant perçu par le retraité correspondait à un salaire d’activité ou à une prime ponctuelle liée à l’emploi occupé avant le passage à la retraite. Or, les personnes qui liquident leur retraite peuvent percevoir des primes quelque temps après leur départ, voire l’année suivant la liquidation. Retenir les assurés dans cette situation conduisait à légèrement surestimer l’effectif des cumulants. Afin de limiter cette surestimation, les retraités ayant un salaire uniquement l’année suivant la liquidation inférieur à un salaire annuel validant un trimestre étaient exclus arbitrairement de la population des retraités cumulants pour les études. Suivant cette logique c’est en moyenne près de 10 % des cumulants ayant liquidé au cours de l’année n-1 qui étaient exclus. Avec la nouvelle méthodologie, les assurés qui ont une date d’effet en 2019, un report de salaire en 2020 ne permettant pas de valider un trimestre et pas de report de salaire en 2021 sont 6 704 soit 1,6 % des cumulants de 2020. Il ne semble donc pas nécessaire de continuer à faire ce filtre.
Suivi des retraités du régime général qui reprennent une activité en tant que travailleurs indépendants
L’effectif des cumulants retraités du régime général actifs en tant que travailleurs indépendants est déterminé à partir d’une base de données exhaustive 2019-2020, dans laquelle sont identifiés les assurés à la fois prestataires du régime général et cotisants en 2020 en tant qu’indépendants. Les cumulants actifs en tant qu’artisans et commerçants de 2020 sont identifiés selon une stratégie commune au suivi du cumul des actifs salariés. Les conditions sont plus restrictives que celles qui étaient retenues de 2008 à 2018 pour identifier un cumulant actif en tant que travailleur indépendant puisqu’était considéré comme cumulant en N, un assuré qui exerçait une activité indépendante en tant qu’artisan, commerçant ou professionnel libéral réglementé. L’opération, menée en 2020 sur des données de 2018, a donné lieu à deux études publiées en 2020 : l’une porte sur les effectifs (Julliot M., Les effectifs de travailleurs indépendants également retraités du Régime général et/ou de la Sécurité sociale des indépendants, Note DSPR-2020-041, Cnav, Juillet 2020), l’autre sur les profils des cumulants (Julliot M., Les profils des travailleurs indépendants également retraités du Régime général et/ou de la Sécurité sociale des indépendants, Note DSPR-2020-049, Cnav, Juillet 2020).
Les éléments concernant les assurés de la Cnav, de l’IRCANTEC ou de la Carpimko percevant des revenus et qui ont liquidé une pension à la CNRACL sont issus d’un rapprochement des données de la Carpimko, de la Cnav, de la CNRACL et de l’Ircantec en 2012, qui a donné lieu à deux études publiées en 2015 (Bac C., Dardier A. et Bridenne I. (2015), «Les salariés au régime général retraités de la fonction publique hospitalière ou territoriale : une seconde carrière après la retraite ?», n°29, Cadr@ge, Cnav, juin ; Bac C., Bridenne I, Dardier A. et. Micallef P. (2015), « Éclairage sur la reprise d’activité des retraités des fonctions publiques territoriale et hospitalière », n°12, QRS, CDC, juillet).
Evolutions législatives du cumul emploi-retraite
Avant 2009, le cumul emploi-retraite au sein d’un même groupe de régimes était toujours plafonné.
Au sein du régime général, les assurés pouvaient cumuler le bénéfice de leur pension de retraite avec la perception de revenus d’activité, sous une double condition de rupture du lien avec le dernier employeur avant la liquidation de la pension, et de plafond de ressources. Un retraité ne pouvait reprendre une activité auprès de son dernier employeur qu’à l’issue d’une durée minimale de six mois après la liquidation de la retraite. L’addition des ressources des pensions de base et complémentaires et des revenus d’activité ne pouvait excéder la moyenne des trois derniers salaires bruts mensuels d’activité.
Depuis le 1er janvier 2007, si le montant de 1,6 SMIC est supérieur aux trois derniers salaires, c’est ce dernier qui est retenu.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 a institué le cumul emploi-retraite libéralisé en supprimant le plafonnement des revenus pour les retraités ayant liquidé toutes leurs pensions des régimes obligatoires de retraite dès lors qu’ils ont atteint l’âge légal de départ en retraite et qu’ils totalisent la durée d’assurance requise pour obtenir une retraite à taux plein, ou qu’ils ont atteint l’âge d’obtention du taux plein. Le retraité qui ne remplit pas toutes les conditions nécessaires au cumul intégral doit remplir les conditions prévues pour le cumul plafonné.
La réforme des retraites de 2014 a modifié les règles du cumul emploi-retraite en supprimant la notion de groupe de régimes et en rendant les cotisations dues dans le cadre de la reprise d’activité non génératrices de droits nouveaux à retraite.
Depuis le 1er avril 2017, lorsque le plafond de revenus est dépassé pour le bénéfice du cumul emploi retraite plafonné, la pension n’est plus suspendue mais réduite à due concurrence.
Les retraités du régime général cumulants en tant qu’artisans ou commerçants sont soumis à différentes règles législatives en fonction du moment où ils ont liquidé leur pension. En effet, avant le 01 janvier 2015, lorsque l’assuré exerçait une activité relevant d’un autre groupe de régimes que celui dans lequel il avait liquidé sa retraite, il continuait de s’ouvrir des droits à retraite dans le régime où il effectuait le cumul (cela concerne 28 000 assurés en 2020). Depuis le 01 janvier 2015, pour les personnes qui liquident une première retraite de base, les activités exercées en cumul n’ouvrent aucun nouveau droit à la retraite quel que soit le régime de retraite d’affiliation. A partir du 01 juillet 2017, avec l’entrée en vigueur de la LURA, le régime liquidateur est toujours le dernier des trois régimes où l’assuré a été affilié, sauf exceptions.
La réforme de 2023 introduit la possibilité pour les assurés en CER d’améliorer leurs droits retraite. Jusqu’à ce jour, les périodes de CER donnaient lieu à cotisation, mais à aucun droit nouveau. Dorénavant, le CER sera créateur de droits au RG : les assurés pourront liquider une seconde pension, correspondant à leur carrière postérieure à la première liquidation. S’ils disposaient déjà d’une pension au RG, ce montant viendra s’ajouter à leur première pension.
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