Les principaux dispositifs en faveur de l’équité au sein des générations

1.15. Dispositifs compensatoires non contributifs (périodes assimilées, majoration de durée d’assurance ou de pension, AVPF)

Afin de compenser l’effet des aléas de carrières sur les retraites, des dispositifs qui ne dépendent pas directement des cotisations versées par les travailleurs accordent des droits complémentaires, sous forme de trimestres supplémentaires ou de majorations de pension.
Pour bénéficier d’une pension de retraite à taux plein, les assurés affiliés au régime général doivent respecter des conditions d’âge (cf. indicateur n°1 8) et de durée d’assurance. La durée d’assurance s’acquiert principalement en contrepartie de cotisations versées par les assurés et les employeurs (trimestres cotisés), et peut être complétée par des trimestres validés, notamment au cours de périodes d’interruption de travail : 

  • les trimestres dits « périodes assimilés (PA) » accordés au titre des interruptions d’activité, telles que le chômage, la maladie ou l’invalidité, ou de la reconnaissance de la participation à l’intérêt général de la nation (éducation des enfants, service national ou périodes de guerre) ; 
  • les trimestres d’assurance vieillesse des parents aux foyers (AVPF) permettent aux parents qui ont cessé ou réduit leur activité et qui bénéficient à ce titre de certaines prestations familiales, de valider en complément des trimestres au régime général avec un report au compte équivalent au Smic ; 
  • les trimestres de majoration de durée d’assurance (MDA) attribués au titre de la maternité et de l’éducation d’enfants. 

Outre ces trimestres supplémentaires, des dispositifs prévoient des majorations du montant de la pension pour tenir compte de situations particulières, le plus souvent liées à la famille et au fait d’avoir des enfants. La plupart des régimes d’assurance vieillesse prévoient des dispositifs similaires, mais les conditions d’accès et les modalités d’attribution présentées dans cet indicateur correspondent à celles appliquées au régime général.
Des travaux  menés sur la base des données de l’échantillon inter-régimes des retraités 2016, fournissent une estimation du poids des dispositifs de solidarité (dont ceux abordés dans cette fiche) dans la masse totale des pensions versées par l’ensemble des régimes obligatoires. Selon ces estimations, les dispositifs de solidarité, qui concernent 93 % de l’ensemble des retraités, ont contribué aux pensions de droits directs de 2016 à hauteur de 16,3 % du montant total, soit 43,8 Md€ (dont près de la moitié sont des PA). Plus précisément, les trimestres assimilés, qui bénéficient à 41 % des retraités, représentent 6,1 Md€ en 2016, la majoration de pension pour enfants portant sur les droits directs, qui concerne 40 % des retraités, 8,1 Md€, les trimestres de MDA, 4,6 Md€ et les trimestres d’AVPF 2,3 Md€. Enfin, les majorations de durée des régimes spéciaux et de la fonction publique représentent 2,3 Md€ en 2016.

Depuis 2005, une augmentation conséquente des durées validées et cotisées

L’augmentation des durées cotisées et validées ces dernières années résulte de la combinaison de plusieurs facteurs, notamment liés à la structure démographique et aux changements de la règlementation.
Les personnes ayant validé la durée d’assurance requise peuvent partir à la retraite à l’âge de l’ouverture des droits, voire avant celui-ci, dans le cadre du dispositif de retraite anticipée (cf. indicateur 16.1).
A l’inverse, les assurés dont les carrières sont incomplètes et qui ne bénéficient pas de dispositifs dérogatoires doivent attendre l’âge d’annulation de la décote (AAD) s’ils souhaitent partir au taux plein, ce qui ouvre également droit au minimum contributif s’ils ont une faible pension (cf. indicateur 1.12).
Selon les prévisions pour l’année 2022, le nombre moyen de trimestres validés par les hommes partant en retraite avant l’âge légal serait supérieur d’environ 14 trimestres à celui validé par ceux partant en retraite entre l’âge légal et l’âge d’annulation de la décote. Par rapport aux assurés qui partent à l’AAD, ce nombre serait supérieur de 25 trimestres (cf. tableau 1). Ces écarts sont plus prononcés pour les femmes : ces différences de durée validée s’élèveraient respectivement à +20 et +54 trimestres. Cela s’explique par le fait que les femmes sont plus nombreuses que les hommes à avoir des carrières incomplètes.

Les femmes ont davantage recours aux dispositifs compensatoires

Au régime général, le nombre de trimestres validés au titre de l’AVPF, des PA et des MDA est en moyenne plus élevé pour les femmes que pour les hommes (respectivement 40 et 13 trimestres). Pour les nouveaux retraités de l’année 2022, ces trimestres représenteraient 25 % de la durée totale validée des femmes, contre 8 % pour les hommes. 
Si le nombre de trimestres au titre des périodes assimilées est comparable entre hommes et femmes (respectivement 12 et 10 trimestres), ces dernières valident en moyenne 14  trimestres au titre des majorations de durée d’assurance (aucun pour les hommes) et 16 trimestres au titre de l’AVPF (1 pour les hommes (cf. graphique 1)). 
Cette décomposition des trimestres par type de report est à interpréter avec précaution. Dans certains cas, l’assuré a validé un total supérieur à 4 trimestres, par exemple 3 trimestres de cotisations, 1 trimestre de chômage et 1 trimestre de maladie. On ne retient cependant dans le calcul de la durée d’assurance que 4 trimestres maximum, selon un ordre de priorité défini (cf. précisions méthodologiques).

Les périodes assimilées

Les périodes assimilées correspondent à des reports de trimestres sur le relevé de carrière, pour l’essentiel sans salaire (l’exception étant le congé maternité, période pour laquelle le montant des indemnités journalières majorées est porté au compte), dans la limite de quatre par année civile et dans des conditions variables selon la cause de l’interruption involontaire d’activité (cf. tableau 2). Ces trimestres sont pris en compte dans le calcul de la retraite ; ils améliorent le coefficient de proratisation et le taux de liquidation (dans la limite du taux plein). Ces trimestres ne sont à l’inverse pas pris en compte pour la majoration du minimum contributif ou dans le calcul de la surcote.
En revanche, ils peuvent dans certains cas, être considérés comme des trimestres « réputés cotisés » et compter pour la retraite anticipée « carrière longue » (cf. indicateur n°1-16-1).
Les assurés du régime général liquidant leurs droits propres en 2022 valideraient en moyenne 10 trimestres assimilés pour les femmes et 12 trimestres pour les hommes. 61 % des périodes assimilées concernent des périodes de chômage, 24 % d’invalidité et 9 % de maladie ou de maternité pour les nouveaux retraités (anciens travailleurs salariés) de 2022. Toutefois, 12 % des périodes assimilées pour les hommes font suite à une interruption d’activité due à un service national ou une période de guerre (aucune pour les femmes).

 
Tableau 1 ● Durée d’assurance validée en fonction de l’âge de départ en retraite (avec majoration de durée d’assurance)

 
(p) : prévisions.
Source : Cnav
Champ : durée tous régimes des retraités anciens travailleurs salariés

Graphique 1 ● Décomposition de la durée moyenne validée utile lors du départ en retraite, selon la nature des trimestres validés pour les nouveaux retraités de l’année 2022
 
Source : Cnav. 
Champ : durée tous régimes des retraités anciens travailleurs salariés, données prévisionnelles 

Graphique 2 ● Répartition des périodes assimilées selon la cause de l’interruption involontaire d’activité pour les nouveaux retraités en 2022

 
Source : Cnav; 
Champ : durée tous régimes des retraités anciens travailleurs salariés, données prévisionnelles
Note : Les trimestres « équivalent et autres » sont des périodes d’activités qu’il est possible de valider en l'absence de report de cotisations ou de salaires et s'il existe des présomptions précises et concordantes que des cotisations ont été précomptées sur les salaires de l'assuré. 

Les majorations de durée d’assurance (MDA)

Les majorations de durée d’assurance (MDA) consistent en l’attribution de trimestres supplémentaires au titre de charges familiales ; elles permettent ainsi d’augmenter le coefficient de proratisation appliqué au salaire moyen lors du calcul du montant de la pension et d’atteindre plus rapidement le taux plein par la durée (cf. tableau 3). Les MDA s'ajoutent, en fin de calcul, au nombre de trimestres présents sur le relevé de carrière. Elles ne sont pas prises en compte pour déterminer le droit à la retraite anticipée, à la majoration du minimum contributif ou dans le calcul de la surcote.
Les majorations de durée d’assurance, acquises quasi-exclusivement par des femmes, contribuent fortement à réduire l’écart de durée validée entre les genres (cf. graphique 3) : elles n’ont pas d’effet sur les durées moyennes validées par les hommes et augmenteraient en moyenne celles des femmes de 14 trimestres en 2022. Néanmoins, le nombre de trimestres MDA parmi les trimestres validés par les femmes diminue, en raison d’un nombre moyen d’enfants plus faible et d’une augmentation des trimestres acquis au cours de la carrière. En effet, les trimestres validés au cours de la carrière sont prioritaires sur les MDA, qui ne contribuent donc pas toujours à la durée d’assurance.
 

Graphique 3 ● Durées cotisées et validées, sans et avec majorations de durée d’assurance, pour les nouveaux retraités


(p) : prévisions.
Source : Cnav
Champ : durée tous régimes des retraités anciens travailleurs salariés

 

L’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF)

L’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) a pour objet la prise en compte par l’assurance vieillesse des périodes passées à élever des enfants ou à s’occuper d’un enfant ou d’un adulte handicapé. Sous conditions de ressources, elle permet aux bénéficiaires de certaines prestations familiales ou allocations en faveur des personnes handicapées d’être affiliés au régime général au titre de périodes non travaillées (ou travaillées à temps réduit) (cf. tableau 5). Lorsque ces conditions sont remplies, l’affiliation est automatique : tous les trimestres passés dans la situation ouvrant droit à l’AVPF sont validés pour la retraite. Des droits sont constitués au régime général moyennant le versement d’une cotisation d’assurance vieillesse par la branche famille, dont le montant mensuel correspond à celui qui serait versé au régime général pour un salaire équivalent à 169 heures payées au SMIC. Ce dispositif permet ainsi d’augmenter la durée d’assurance validée des personnes qui en bénéficient et peut conduire à modifier le salaire annuel moyen (SAM) de référence retenu pour déterminer le montant de la pension. Les trimestres ne contribuent pas systématiquement à la durée d’assurance, notamment si l’assuré a déjà quatre trimestres d’emploi. D’après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (septembre 2019), 78 % des trimestres validés par les nouvelles retraitées du régime général au titre de l’AVPF contribuaient à la durée d’assurance.
En 2021 (année la plus récente disponible), 1,7 million de personnes ont bénéficié d’au moins un report de cotisation au titre de l’AVPF.
L’essentiel des bénéficiaires (89 %) sont des femmes, mais la proportion de trimestres AVPF attribuée à des hommes tend néanmoins à s’accroître au fil du temps : si les hommes représentaient 7,5 % des allocataires ayant eu un versement de cotisations AVPF en 2009, cette part atteint désormais 10 % (Cnaf, chiffres-clés des prestations légales 2017).
La moitié des personnes ayant eu un versement de cotisations au titre de l’AVPF en 2022 étaient des bénéficiaires de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant (qui peut être perçue dès le premier enfant et sous conditions de ressources) et 39 % étaient allocataires du complément familial (attribué aux familles de 3 enfants ou plus, sous conditions de ressources, cf. graphique 4).
 

Graphique 4 ● Répartition des allocataires ayant eu un versement de cotisations au titre de l’AVPF en 2022, selon la prestation familiale leur en ayant ouvert l’accès
  
Notes : PAJE : Prestation d’accueil du jeune enfant - CLCA : Complément libre choix d’activité – APP/AJPP : Allocation (journalière) de présence parentale – AEEH : Allocation d’éducation de l’enfant handicapé – AAH : Allocation adulte handicapé – CPA : congé de proche aidant ; les données présentées ici présentent les versements de cotisation au titre de l’AVPF, elles concernent donc des personnes encore actives (ou du moins n’ayant pas liquidé leur retraite) en 2021. Ces données ne sont pas homogènes avec celles du premier graphique qui concerne les nouveaux retraités de 2022.
Source : Cnaf, Chiffres-clés des prestations légales 2022

Les majorations de pension

Une majoration proportionnelle au montant de la pension (de droit direct et/ou de droit dérivé) est attribuée par la plupart des régimes de retraite aux pensionnés ayant élevé au moins 3 enfants. Certains régimes accordent également des majorations de pension aux personnes qui recourent à l’aide constante d’une tierce personne (cf. Tableau 4). 
En 2021, 5,6 millions de pensionnés (anciens travailleurs salariés et indépendants), soit 38 % de l’ensemble des retraités du régime général, bénéficiaient de la majoration de pension pour enfants (cf. Graphique 5). Cette proportion a diminué de 4 points en 10 ans, conséquence de la diminution progressive de la taille des familles parmi les nouvelles générations de retraités. Parmi ces bénéficiaires, 57 % sont des femmes, cette proportion est relativement stable depuis une décennie.

En 2021, près de 17 000 pensionnés (anciens travailleurs salariés et indépendants) du régime général bénéficient de la majoration de pension pour tierce personne. L’effectif des bénéficiaires de cette majoration augmentant moins vite que celui des pensionnés, cette proportion a diminué, passant de 0,17 % en 2005 à 0,11 % en 2021. Parmi ces bénéficiaires, 46 % sont des femmes ; cette proportion est stable depuis une décennie.

Sources des données

Les masses financières liées aux dispositifs de solidarité dans le système de retraite proviennent des travaux menés par la Drees publiés en 2019 (Drees, Etudes et résultats n°1116, Pensions de retraite : les dispositifs de solidarité représentent 16 % des montants versés, juin 2019). Les travaux ont été réalisés à partir de l’échantillon inter-régimes de retraités (EIR) de 2016 et couvrent tous les régimes de retraite obligatoire. Le poids de chaque dispositif de solidarité a été établi en soustrayant successivement chacun d’entre eux et en estimant l’effet sur le montant de la pension versée. 

Le champ couvert pour les durées d’assurance présentées dans cette fiche est celui des données de la Cnav de métropole et des DROM. Il s’agit de la durée moyenne tous régimes des retraités anciens travailleurs salariés uniquement (droit commun et retraites anticipées), dont la pension de droit direct contributif prend effet au cours de l’année considérée. Les durées moyennes sont issues des projections réalisées pour la Commission des comptes de la sécurité sociale. Elles sont observées de 2005 à 2021, partiellement projetées en 2022.

Les conditions d’accès et les modalités d’attribution présentées dans cette fiche correspondent à celles appliquées au régime général. Toutefois, l’acquisition de droits retraite au titre de l’AVPF est gérée exclusivement par la branche vieillesse du régime général pour tous les assurés, qu’ils soient ou non affiliés à ce régime.

Dans cet indicateur, la décomposition des trimestres par type de report repose sur une convention. En effet, les trimestres retenus sont déterminés selon l’ordre de priorité suivant : les trimestres d’emploi (donnant lieu à cotisations), les trimestres AVPF, les périodes d’invalidité, les périodes militaires, les périodes maladie (maternités incluses), les périodes de chômage, les périodes équivalentes et autres périodes. Si le total des trimestres dépasse 4 pour une année donnée, les trimestres supplémentaires sont écrêtés, dans l’ordre de priorité précédemment présenté. Les MDA, qui complètent la durée d’assurance à la liquidation sans être rattachées à une année particulière, ne sont en revanche pas soumises à cet écrêtement. Elles ne sont toutefois retenues que si l’assuré ne réunit pas le nombre de trimestres requis pour sa génération, et jusqu’à atteindre ce nombre au maximum. Les chiffres présentés ici se concentrent sur les trimestres qui sont effectivement retenus pour le calcul de la retraite.

Organisme responsable de la production de l’indicateur : DSS / Cnav

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