Objectif n°3 : Garantir les moyens nécessaires au système de santé
La Stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030 fixe pour objectif de « réduire les grossesses non prévues et non désirées » (axe III, objectif 2) et d’accélérer la prise en charge des demandes d’IVG, avec un objectif de 90 % des demandes d’IVG prises en charge dans un délai de 5 jours. Dans ce but, la loi du 2 mars 2022 visant à renforcer le droit à l'avortement prolonge notamment le délai légal d’avortement de 12 à 14 semaines de grossesse, pérennise l’allongement du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville de 5 à 7 semaines de grossesse, et étend la compétence de la pratique des IVG instrumentales aux sages-femmes dans le cadre hospitalier. Cette loi a pour but de garantir l’accès à l’IVG et de pallier les inégalités territoriales dans l’accès à l’avortement, soulignées dans le rapport d’information parlementaire de septembre 2020.
En 2021, 223 000 interruptions volontaires de grossesse (IVG) ont été effectuées en France, soit environ 15 IVG pour 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans (cf. Graphique 3). La période du premier confinement, au début de l’épidémie de Covid-19, a entraîné une nette baisse du nombre des IVG réalisées ( -10 000 entre 2019 et 2020), du fait d’une réduction des conceptions.
La part d’IVG médicamenteuses, réalisées par prise de médicaments, a fortement augmenté au cours des dernières années : elle est passée de 31 % des IVG en 2001 à 76 % en 2021. L’augmentation des dernières années (+8 points entre 2019 et 2021) peut s’expliquer en partie par l’allongement dérogatoire des délais pour pratiquer l’IVG en ville, accordé en raison de la crise sanitaire, et par une orientation plus forte des femmes vers les professionnels en ville par crainte d’une saturation de l’offre hospitalière durant cette période.
Cependant, l’accès à l’IVG demeure inégal entre les départements : en 2021, 17,2 % des femmes recourant à l’IVG l’ont fait en dehors de leur département de résidence, et 4,2 % l’ont fait hors de leur région de résidence (cf. Graphique 1). Dans 28 départements, plus d’un cinquième des femmes avortent hors de leur département de résidence (cf. Carte 1). L’augmentation de la proportion moyenne de femmes avortant hors de leur région de résidence depuis 2016 (+0,5 point) se vérifie dans toutes les régions à l’exception de l’Auvergne Rhône-Alpes (-0,6 point) et de l’Occitanie (-0,1 point), y compris pour les régions dans lesquelles cette part est supérieure à la moyenne nationale (cf. Graphique 2).
En 2019, l’enquête « Un jour donné » (cf. précisions méthodologiques) menée par le Ministère des Solidarités et de la Santé avait cherché à mesurer la durée moyenne d’accès à l’IVG par région (cf. Carte 2). 11 régions enregistraient alors un délai d’accès moyen de 6 jours ou plus. A l’échelle nationale, le délai d’accès moyen était de 7,4 jours.
En comparant les Cartes 1 et 2, on remarque qu’un certain nombre des départements pour lesquels plus de 20 % des femmes ont avorté hors de leur département de résidence se situent dans des régions où le délai moyen d’accès est compris entre 8 et 11 jours.
Ces disparités peuvent en partie s’expliquer par des inégalités territoriales en termes d’accès à l’information et aux dispositifs de santé sexuelle. En 2022, 11 départements disposent de moins de 2 centres de santé sexuelle pour 100 000 résidents âgés de 15 à 49 ans (cf. Carte 3). Au contraire, 37 départements disposent de plus de 5 centres pour 100 000 résidents entre 15 et 49 ans, la majorité se situant entre 2 et 5 centres pour 100 000 résidents (53 départements). Ainsi, 14 des départements dans lesquels plus de 20 % des femmes avortent hors de leur département de résidence disposent de moins de 5 centres de santé sexuelle pour 100 000 résidents âgés de 15 à 49 ans. L’offre de pratiques des IVG hors établissements, inégale sur le territoire, pourrait aussi expliquer une partie du recours à l’IVG hors département.
Graphique 1 ● Part des IVG réalisées en hors du lieu de résidence
Source : DREES, « Interruption volontaire de grossesse », édition 2022
Graphique 2 ● IVG réalisées hors du département de résidence pour les régions dont la part est supérieure à la moyenne nationale
Source : DREES, « Interruption volontaire de grossesse », édition 2022
Carte 1 ● Part des IVG réalisées hors du département de résidence en 2021
Source : DREES, « Interruption volontaire de grossesse », édition 2022
Carte 2 ● Délai d'accès moyen à l'IVG par région, en 2019
Source: Enquête « Un jour donné », 2019
Carte 3 ● Densité des centres de santé sexuelle par département
Note: La densité est exprimée en nombre de centres pour 100 000 résidents âgées de 15 à 49 ans.
Source : Liste gouvernementale des centres de santé sexuelle (Les centres de santé sexuelle | IVG.GOUV.FR N°Vert 0800 08 11 11), calculs DSS
Les données sur le nombre d’IVG réalisées et la part d’IVG réalisée hors du département de résidence proviennent de la publication annuelle de la DREES sur l’IVG.
Pour les IVG hospitalières, le département de résidence est déclaré par la patiente lors de l’hospitalisation. Pour les IVG réalisées hors hospitalisation (en ville), il s’agit du lieu de résidence déclaré à l’Assurance Maladie.
Les IVG pour lesquelles le lieu de résidence est inconnu ont été classées au lieu de leur réalisation lorsque cela était possible à partir de 2017, d'où une diminution du nombre de "non-résidents" par rapport aux années précédentes. Les taux de recours ont été calculés en rapportant les IVG concernant des femmes de 15 à 49 ans (y compris les âges inconnus, sauf pour les indicateurs par âge) aux femmes résidentes de 15 à 49 ans. Il faut noter que pour une part non négligeable des IVG réalisées hors établissements hospitaliers un NIR spécifique anonyme IVG est utilisé et qu'il ne permet de connaître ni l'âge des femmes concernées ni leur département de domicile. Selon les recommandations de la Cnam (circulaire 49/2003) ces IVG ne devraient concerner que des mineures. Le taux de recours est donc probablement sous-estimé parmi les femmes de 15 à 17 ans.
L’enquête « un jour donné » a été conduite entre mai et juillet 2019, à l’initiative du Ministère des Solidarités et de la Santé. Son but était de recueillir des données quantitatives sur le délai d’accès à l’IVG, défini comme le délai entre le premier contact des femmes souhaitant réaliser une IVG avec un professionnel de santé et la réalisation de l’acte.
Les ARS ont sollicité les établissements de santé de leur région réalisant des IVG avec un questionnaire, et ont recueilli le délai d’accès à l’IVG des femmes présentes « un jour donné » pour la réalisation d’IVG médicamenteuse ou instrumentale.
La densité départementale de centres de santé sexuelle a été calculée en fonction du nombre de centres dans chaque département pour 100 000 résidents âgés de 15 à 49 ans.
Pour aller plus loin
« Rapport d’information sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse », 2020, fait au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes par Mme Battistel et Mme Muschotti, députées.
« Interruptions volontaire de grossesse », publication annuelle de la DREES, édition 2022
« Femmes et hommes, l’égalité en question », publication de l’INSEE, édition 2022
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