Objectif n°5 : Renforcer l’efficience du système de soins et développer la maîtrise médicalisée des dépenses

2.10.2. Dynamique des produits de santé à l’hôpital

Finalité

Le présent indicateur a pour objectif de suivre l’évolution des dépenses nettes d’assurance maladie de médicaments et dispositifs médicaux implantables (DMI) financés en supplément des groupes homogènes de séjour (GHS) et de mesurer l’impact des actions de maîtrise des dépenses mises en œuvre pour les réguler.

Le dispositif de « liste en sus », créé en 2005, dans le cadre de la mise en place de la tarification à l’activité (T2A) des prestations hospitalières de MCO, est destiné à garantir le financement des traitements innovants et onéreux, et à favoriser leur accès aux patients. Sont inscrits sur la liste en sus les molécules onéreuses (essentiellement des médicaments anticancéreux) et les dispositifs médicaux implantables (DMI) innovants particulièrement coûteux (principalement de cardiologie et d’orthopédie), qui bénéficient ainsi d’un financement dérogatoire en sus des dépenses couvertes par l’assurance maladie à hauteur des forfaits prévus par les GHS. La liste en sus est commune aux établissements publics et privés.
Globalement, trois facteurs principaux déterminent l’évolution des dépenses brutes de la liste en sus : l’évolution de la prévalence des pathologies traitées (nouveaux patients, nouveaux diagnostics) ; les nouvelles inscriptions (ou extensions d’indications) de produits sur la liste; les radiations de produits de la liste, qui conduisent à leur réintégration au sein des tarifs des GHS. Ces dépenses sont soumises à des mécanismes de régulation directe utilisés par les pouvoirs publics tels que les baisses de prix, les remises et les clauses de sauvegarde afin de maitriser l’évolution des dépenses des produits de santé. Cela donne lieu à la dépense nette qui sera présentée ci-après. 
Les conditions d’inscription et de radiation de médicaments sur la liste en sus ont été revues et règlementées par décret1 depuis mars 2016. Pour exemple depuis cette date, les médicaments, dont l’amélioration du service médical rendu est mineure (ASMR 4), ne peuvent plus être inscrits sur la liste en sus, à moins qu’il existe un comparateur cliniquement pertinent pour la même indication déjà inscrit sur la liste en sus, ou qu’ils concernent une indication pour laquelle aucune autre alternative thérapeutique n’existe (médicamenteuse ou chirurgicale) et qu’ils présentent un intérêt de santé publique. La croissance exponentielle des achats de médicaments sous autorisation temporaire d’utilisation (ATU) par les établissements de santé en 2015 et 2016 (plus de 200 % chaque année avec notamment l’arrivée sur le marché de nouveaux traitements anticancéreux) s’est traduite par un sous-dimensionnement croissant des crédits d’assurance maladie identifiés au sein des missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI) et destinés à couvrir ces coûts. C’est pourquoi, la LFSS pour 20172 a prévu que les médicaments sous ATU dispensés au cours d’un séjour en établissement de santé soient remboursés selon les mêmes modalités que ceux de la liste en sus depuis le 1er janvier 2017 . Une réforme des ATU visant à simplifier et harmoniser les procédures est mise en place avec le PLFSS pour 2021. Suite à cette réforme, l’autorisation temporaire d’utilisation de cohorte et l’autorisation temporaire d’utilisation nominative sont dénommés respectivement autorisation d’accès précoce et autorisation d’accès compassionnel (AP-AC).

 

1 Décret n° 2016-349 du 24 mars 2016 relatif à la procédure et aux conditions d'inscription des spécialités pharmaceutiques sur la liste mentionnée à l'article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale.
2 Art. 95 de la LFSS pour 2017.

 

Résultats

Les dépenses d’assurance maladie obligatoire3  au titre des produits de santé financés en sus des prestations d’hospitalisation en médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) - y compris en hospitalisation à domicile (HAD) - représentent près de 6,3 Md€ en 2022, qui se répartissent pour 66 % en médicaments et 34 % en DMI (source : comptes des régimes et produits à recevoir du Comité Economique des Produits de Santé - CEPS). Elles ont progressé de 6,5 % en 2022 : +5,2 % pour les dispositifs médicaux implantables et 7,3 % pour les médicaments. Cependant, entre 2019 et 2022, le taux annuel moyen pour l’ensemble des produits de santé de la liste en sus est de 4,1 %, dépassant légèrement l’objectif de +3 % par an pour la même période.

 

3 Montants bruts, avant application des remises pharmaceutiques.

 

Graphique 1 ● Dépenses d’assurance maladie obligatoire (AMO) des médicaments et des produits et prestations financés en sus des groupes homogènes de séjours (GHS)

Source : DSS, données issues des comptes des régimes (constat ONDAM).
Champ : tous régimes, France entière, pour les médicaments en sus : délivrés en MCO, y compris en hospitalisation à domicile (HAD). Depuis 2017, les médicaments de la liste en sus intègrent des médicaments sous autorisation d’accès précoce et d’accès compassionnel AP-AC (ex-ATU).
Note : En 2020, les dispositions relatives aux remises des spécialités bénéficiant d’une ATU/post-ATU ont fait l’objet de multiples modifications législatives ayant produit des effets sur les montants des remises facturées en 2020. En effet, une partie des remises 2020 relèvent des exercices antérieurs mais ont été comptabilisées intégralement sur cette même année 2020 (article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2020).
* Un objectif global d’évolution des dépenses de la liste en sus a été fixé par l’Etat depuis 2009, puis scindé en deux en 2012, afin de suivre de façon séparée les médicaments et les DMI, à nouveau global à partir de 2019.

Tableau 1 ● Dépenses des médicaments et des produits et prestations financés en sus des groupes homogènes de séjours (GHS)

Source : DSS, données issues des comptes des régimes (constat ONDAM).
Champ : tous régimes, France entière, pour les médicaments en sus : délivrés en MCO, y compris en hospitalisation à domicile (HAD). Depuis 2017, les médicaments de la liste en sus intègrent des médicaments sous autorisation d’accès précoce et d’accès compassionnel AP-AC (ex-ATU).
Note : En 2020, les dispositions relatives aux remises des spécialités bénéficiant d’une ATU/post-ATU ont fait l’objet de multiples modifications législatives ayant produit des effets sur les montants des remises facturées en 2020. En effet, une partie des remises 2020 relèvent des exercices antérieurs mais ont été comptabilisées intégralement sur cette même année 2020 (article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2020).
* Un objectif global d’évolution des dépenses de la liste en sus a été fixé par l’Etat depuis 2009, puis scindé en deux en 2012, afin de suivre de façon séparée les médicaments et les DMI, à nouveau global à partir de 2019.
 (1) Le taux de croissance annuel moyen (TCAM) pour la période de 2019-2022 est présenté pour information

L’évolution de la dépense de la liste en sus peut être découpée en cinq phases :

  • Une période relativement stable jusqu’à 2016, avec une croissance annuelle moyenne autour de 4 % (TCAM 2011-2016) en conséquence d’une gestion plus stricte des inscriptions/radiations, de baisses tarifaires et de la mise en œuvre du dispositif d’inscription par indication des médicaments ;
  • une montée en charge de la dépense de médicaments en 2017, due à l’inclusion des dépenses des médicaments sous AP-AC (ex-ATU) dispensés au cours d’un séjour en établissement de santé qui sont désormais remboursées selon les mêmes modalités que celles de la liste en sus. C’est pourquoi, la progression des dépenses brutes de médicaments était de 19,1 % en 2017, et de 9,4 % après application des remises pharmaceutiques.
  • une nette accélération de la croissance de la dépense brute de médicaments hors AP-AC (ex-ATU) à partir de 2018, autour de 15 % en moyenne annuelle entre 2018 et 2021, associée principalement à l’arrivée des nouvelles molécules coûteuses. Comme précédemment, cette évolution a été maîtrisée par le mécanismes des remises pharmaceutiques, réduisant l’évolution à 4,5 % en moyenne annuelle après son application.  
  • Une baisse importante des dépenses de DMI en 2020 provoquée par les déprogrammations d’interventions chirurgicales en raison de la crise Covid. 
  • Et finalement, une augmentation soutenue à partir de 2021 expliquée principalement par la reprise graduelle de l’activité hospitalière post-crise et les extensions d’indication des médicaments anti-cancéreux. 

En 2022, la dépense nette de l’assurance maladie des produits de santé inscrits sur la liste en sus a augmenté de 6,5 % par rapport à 2021, et maintient un rythme de croissance modéré depuis 2017 (égal à 4,1 % par an en moyenne), et ce malgré l’impact de la crise sanitaire sur les dépenses d’hospitalisation en 2020 et, dans une moindre mesure, en 2021. Cette évolution globale est à mettre en regard avec le poids de la dépense de chaque type de produit selon le secteur.
Dans le secteur public, la répartition de la dépense entre médicaments et DMI reste stable sur la période 2012-2016, autour de 70 % de dépense liée aux médicaments versus 30 % liée aux DMI et a commencé à se déformer en 2017 pour atteindre 74 %/26 % en 2022. Cette part élevée de médicaments s’explique par une prise en charge plus importante des cas de cancer dans le secteur ex-DG que dans le secteur privé.
Concernant le secteur privé, depuis 2008 les dépenses sont réparties entre 40 % pour les médicaments et 60 % pour les DMI. Cette forte dépense en DMI dans le secteur privé s’explique par sa spécialisation en chirurgie, notamment les chirurgies cardiaques et de hanche. Pendant la période de la crise sanitaire, ce secteur a été le plus touché par la déprogrammation des opérations non-essentielles, ce qui peut, en partie, expliquer la faible dynamique des dépenses remboursées de DMI entre 2019 et 2021 (+0,4 % en TCAM).

Les dispositifs médicaux implantables 
En 2022, la dépense AMO de DMI continue d’augmenter, mais à un rythme plus contenu par rapport à l’année précédente, marquée par un effet de reprise de l’activité post-crise sanitaire. Dans l'ensemble, ce poste a connu une augmentation de 5,2 % par rapport à 2021. Cependant, la croissance moyenne depuis 2019 (+2,6 %) légèrement inférieure à celle constatée entre 2015-2019 (2,9 %) vient confirmer la difficulté du secteur à retrouver la même dynamique de croissance que lors de la période pré-crise sanitaire. La récupération est encore plus lente dans le secteur privé, où les dépenses ont augmenté de 5,1 % par rapport à 2021, mais de seulement 1,6 %, en moyenne annuelle, entre 2019 et 2022. Du côté de la dépense de DMI dans le secteur public, en revanche, la reprise est plus dynamique. L'évolution affiche une hausse plus conséquente avec un taux annuel moyen de croissance de 3,5 % par an entre 2019 et 2022. Cette différence dans l’ampleur de l’évolution entre les deux secteurs est associée à la structure des dépenses qui diffère selon le secteur, comme expliqué précédemment. Ainsi, le secteur public est plus sensible aux facteurs qui peuvent affecter la demande de médicaments, tandis que le secteur privé est plus affecté par les variations de la demande de DMI, même si la part de médicaments est en augmentation depuis 2017. Dans ce sens, les implants orthopédiques, qui sont à l'origine de 84 % de la croissance de la dépense de DMI dans le secteur privé, concentrent à eux seul 54 % des dépenses de ce secteur qui a été fortement réduit pendant la crise sanitaire de 2020 
(-10,9 % par rapport à 2019). Sa moindre croissance moyenne égale à 1,6 % entre 2019 et 2022 souligne la difficulté qu’a le secteur ex-OQN de retrouver le même niveau de croissance que lors de la période de l'avant crise sanitaire malgré la reprise de l’activité depuis 2021.

Les médicaments
Les dépenses nettes de médicaments ont progressé de 7,3 % en 2022. La progression annuelle moyenne entre 2019 et 2022 s’élève pour sa part à +4,8 %. Cette forte dynamique s’explique principalement par la montée en charge de certaines molécules, telles que l’anticancéreux Darzalex® 1800Mg, en forte croissance depuis 2021 ; ou Phesgo® indiqué depuis octobre 2021 dans le traitement de patients adultes atteints d’un cancer du sein métastatique, ainsi que par la croissance toujours soutenue de l’anticancéreux Keytruda® (+28 % par rapport à 2021 dans l’ensemble des secteurs). 
Dans le secteur public, à l’exception de l’année 2020, l'évolution de la dépense de médicaments reste positive depuis 2015. En 2022, l’évolution est de 7,6 %, 5,7 points de pourcentage inférieur à celle de l’année précédente qui était marquée par un effet de rattrapage post crise sanitaire. Ce taux reste supérieur à la croissance annuelle moyenne pour la période de 2019 à 2022 (+4,6 %). Cela montre que le secteur ex-DG s’est non seulement remis du ralentissement de la croissance observée en 2020, mais qu’il croît également à un rythme que se rapproche de celui d’avant la crise sanitaire (6,9 %). Ceci est une conséquence du poids des médicaments anticancéreux sur les dépenses totales de ce secteur. De ce fait, l’anti PD1 Keytruda® explique à lui seul 28 % de la croissance des médicaments du secteur ex-DG. Les dépenses liées à cette molécule continuent de progresser très rapidement (+27 % comparé à l’année précédente) et maintiennent ainsi une dynamique soutenue au cours des dernières années avec une moyenne annuelle de +52 % entre 2018 et 2022.  
Dans le secteur privé, en 2022 la dynamique de croissance ainsi que la liste de médicaments qui pèsent le plus sur les dépenses totales de médicaments sont comparables à celles du secteur public. Ces dépenses connaissent une croissance soutenue entre 2019 et 2022 (+6,1 % en TCAM), qui s’explique notamment par la montée en charge des anticancéreux Keytruda® et Darzalex® 1800Mg, qui en 2022 affichent une forte augmentation par rapport à 2021, respectivement +33 % et 133 %.

L’indicateur retrace l’évolution constatée des dépenses nettes d’assurance maladie des médicaments et des produits et prestations financés en sus des GHS, ainsi que depuis le PLFSS 2018, les médicaments sous AP-AC (ex-ATU) financés de la même façon que la liste en sus. 
L’indicateur était auparavant calculé sur des dépenses brutes, c’est-à-dire avant retraitement des remises et clause de sauvegarde. Depuis l’édition 2024, l’indicateur est basé sur les dépenses nettes, i.e. après déduction des remises et clause de sauvegarde. Concernant les données sur les dépenses brutes, elles étaient issues du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) et traitées par l’agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) de 2008 à 2017, et à partir de 2018, les données sont issues des comptes des régimes. Toutefois, les données issues du PMSI / ATIH sont toujours utilisées pour analyser la conjoncture de chaque secteur et identifier les principaux produits contributeurs à la croissance.

Organisme responsable de la production de l’indicateur : DSS

Téléchargements complémentaires

  • Intégralité du REPSS - Maladie - Edition 2024 8 MB   Télécharger
  • Synthèse du REPSS - Maladie - Edition 2024 819 KB   Télécharger
  • Données du REPSS Maladie - Edition 2024 7 MB   Télécharger