Objectif n°5 : Renforcer l’efficience du système de soins et développer la maîtrise médicalisée des dépenses
En 2023, les dépenses de médicaments délivrés en officine de ville représentent plus de 12 % des dépenses totales de l’assurance maladie entrant dans le champ de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) et plus de 29 % des dépenses de l’assurance maladie pour les soins de ville avant remises et clause de sauvegarde. Ces dernières années, les politiques menées en matière de baisses de prix et de diffusion des génériques ainsi que les politiques visant à augmenter l’efficience des prescriptions et améliorer la prise en charge médicamenteuse des patients ont conduit à modérer l'évolution des dépenses de médicaments en ville. Néanmoins, les six dernières années sont marquées par une sensible hausse des dépenses de médicaments délivrés en officine de ville. La progression observée en 2023 s’explique principalement par la montée en charge sur le marché officinal de nombreuses molécules qui étaient auparavant disponibles exclusivement dans les pharmacies hospitalières. Il s’agit notamment de certains de produits indiqués dans le traitement de la mucoviscidose et de la cardiomyopathie. Les indicateurs présentés ici incluent uniquement les dépenses de médicaments délivrés en officine de ville, qu’elles soient prescrites en ville ou à l’hôpital. Ils ne comprennent donc pas les dépenses de médicaments rétrocédés (dispensés par les pharmacies hospitalières aux patients non hospitalisés, par dérogation ou en complément du circuit habituel des pharmacies en ville).
Malgré un ralentissement de la croissance en 2023 (+7,9 % en 2023 contre 9,4 % et 2022), les dépenses de médicaments du régime général (y compris les anciens affiliés au régime des indépendants) restent très dynamiques. Elles sont portées par la montée en charge de traitement de la cardiomyopathie et celui de la mucoviscidose, initialement délivrés en rétrocession, puis inscrits au remboursement de droit commun et délivrés en officine de ville.
Tableau 1 ● Taux de croissance des dépenses de médicaments en ville
Source : données CNAM : dépenses remboursées par l’assurance maladie, en date de remboursement, données brutes
Champ : Régime général + anciens affiliés RSI, France métropolitaine, y compris sections locales mutualistes
L’effet prix, évolution des prix unitaires entre deux années, reste négatif en 2023. L’impact des baisses de prix s’élève à 2,4 % en 2023, contre 2,6 % en 2022.
En 2023, l’effet génériques a contribué pour 0,9 point à la diminution de la dépense. L’impact important de cet effet en 2020 ( 1,1 %) était lié en partie à une nouvelle mesure plafonnant le remboursement des assurés refusant sans justification médicale la substitution d’un médicament princeps par un générique (article 66 de la LFSS pour 2019 : remboursement du médicament référent plafonné au niveau du prix de son médicament générique le plus cher).
L’effet volume et structure correspond à la hausse du nombre de boites consommés de médicaments ainsi qu’à la modification de la structure de consommation de ceux-ci (substitution de molécules peu chères vers des molécules onéreuses et inversement). Il a été particulièrement important ces cinq dernières années (+11,0% en 2023 et +12,2 % en 2022). En 2023, cet effet est moins dynamique qu’en 2022 en raison notamment d’un plus faible nombre de boîtes prescrites, mesuré sur tous les régimes en France entière y compris les DROM et les COM.
Le taux de prise en charge des dépenses de médicaments en ville a progressé de 0,5 % en 2023. Cette hausse tendancielle du taux de remboursement effectif est en lien avec l’augmentation des dépenses de médicaments pris en charge à 100 %. Cette dernière résulte de deux effets : d’une part, elle est en lien avec l’augmentation de la prévalence des ALD et d’autre part, avec la hausse du nombre de médicaments remboursés à 100 %.
Il convient de noter que la part des prescriptions hospitalières exécutées en officine de ville, qui représentait plus du quart de la dépense jusqu’en 2012, en représente plus du tiers depuis 2015 (et 48,0 % de la dépense en 2023,
cf. indicateur 2-11-3). Structurellement, les prescriptions hospitalières de médicaments connaissent des croissances plus dynamiques que celles de la ville, car les classes de médicaments qui la composent sont associées à des pathologies lourdes (cancer, sclérose en plaques, polyarthrite...), pour lesquelles les traitements sont coûteux et sujets à des innovations thérapeutiques importantes.
S’agissant du niveau de dépenses en produits pharmaceutiques par habitant en comparaison internationale, la France se situe à la 6ème place dans le classement des pays de l’OCDE (ces dépenses incluent l’automédication) en 2021. Le niveau des dépenses de médicaments en France s’élève à 766 $ en parité de pouvoir d’achat en 2021, contre 1 432 $ aux États-Unis, pays de l’OCDE avec la dépense la plus élevée par habitant. La moyenne des pays de l’OCDE est de 635 $ en parité de pouvoir d’achat. Au niveau européen, la France se place en 2ème position derrière l’Allemagne
(1 042 $).
Construction de l’indicateur
Le taux de croissance global des dépenses de médicaments entre deux années N-1 et N se décompose en 4 effets et se calcule de la manière suivante :
(1+taux de croissance global)=(1+EP)*(1+EG)*(1+EVS)*(1+TM)-1
Avec EP= Effet prix, EG= Effet générique, EVS=Effet volume et structure, TM= ticket modérateur.
L’effet prix correspond à l’évolution des prix unitaires entre n-1 et n des spécialités vendues en n.
L’effet génériques correspond à la diminution de la dépense d’une année sur l’autre liée à la substitution d’un princeps par son générique (moins cher).
L’effet ticket modérateur correspond à l’évolution du taux de remboursement moyen par l’assurance maladie lié à la déformation de la structure de la population « consommante » entre patients de droit commun et patients bénéficiant d’une exonération du ticket modérateur.
Enfin, l’effet de volume et de structure rend compte de la hausse du nombre de boîtes de médicaments consommé, ainsi que de la modification de la structure de consommation de ceux-ci (substitution de molécules peu chères vers des molécules onéreuses et inversement, ou déformation de la consommation vers des médicaments mieux remboursés).
Précisions méthodologiques
Les calculs relatifs à cet indicateur sont effectués par la DSS à partir des éléments fournis par la CNAM. Les données de dépenses de médicaments délivrés en officine de ville proviennent des statistiques mensuelles du régime général et du régime social des indépendants en date de remboursement, France métropolitaine y compris les sections locales mutualistes. Les dépenses prises en compte dans cet indicateur ne comprennent pas les médicaments de la rétrocession hospitalière délivrés dans les pharmacies à usage intérieur (PUI) des établissements de santé. Les évolutions sont celles du régime général, y compris les anciens affiliés au régime social des indépendants (RSI), qui représentait sur le poste « médicament » environ 92 % de la dépense en ville en 2023, et donne une approximation du dynamisme des dépenses totales de l’assurance maladie sur le poste médicaments. Les résultats obtenus sont bruts des effets calendaires.
La dépense remboursée de médicaments issue de prescriptions hospitalières est calculée en rapportant les dépenses de pharmacie prescrites par les établissements publics et les hôpitaux privés sans but lucratif participant au service public hospitalier (PSPH) et délivrées en ville aux dépenses remboursées de pharmacie totales délivrée en ville. Ces données sont extraites de Médic’AM.
Les données OCDE sont des données de dépenses pharmaceutiques, y compris l’automédication, par tête à prix courants et en parité de pouvoir d’achat. Elles font partie des tableaux-clés de l’OCDE.
Organisme responsable de la production de l’indicateur : DSS