Objectif n°1 : Revenir progressivement à l’équilibre financier de la sécurité sociale
Le principe de neutralité en trésorerie des relations financières entre l’État et la sécurité sociale est prévu par l’article L. 139-2 du code de la sécurité sociale. De façon générale, il y a spontanément une neutralité financière quand les dépenses (ou pertes de cotisations) opérées par le régime général pour le compte d’un partenaire et leur remboursement par ce même partenaire ont lieu le même jour pour le même montant. Cette symétrie parfaite reste néanmoins théorique. L’indicateur permet d’évaluer l’écart à cette neutralité financière stricte des flux échangés avec un partenaire, en termes d’impact sur le profil de trésorerie et sur le résultat financier de l’ACOSS. Il permet également d’apprécier l’évolution du comportement de paiement des contreparties engendrant cet écart, exprimé en jours d’écart (JDE).
Les données présentées sont celles arrêtées au 31 décembre 2022, dernières disponibles au moment de l’élaboration de cette fiche.
En 2022, la compensation ou le remboursement par l’État ont été opérés avec une avance moyenne de 2 jours par rapport à la date de l’exonération de cotisations accordée aux entreprises ou de paiement des prestations par le régime général. Parallèlement, concernant le dispositif du RSA, on constate un retard de 24 jours entre les prestations versées par les CAF et les remboursements par les départements. De même, on constate un retard de 78 jours entre les dépenses avancées par la branche retraite et les remboursements du FSV. Le coût de ce retard global pour la sécurité sociale est estimé à -23 M€ et le profil de la trésorerie, c'est-à-dire le niveau de l’ensemble des disponibilités, est aggravé de -3,1 Md€.
Le tableau suivant décrit l’écart à la neutralité financière pour les trois principaux partenaires du régime général :
Tableau 1 ● Indicateurs sur la neutralité des relations financières de l’ACOSS et de ses partenaires
Source : ACOSS
Note de précision du tableau : la stricte neutralité se traduirait par des valeurs ‘zéro’ pour les trois paramètres (JDE, coût ACOSS, impact profil) ;
- les flux État ont été versés en moyenne avec 2 jours d'écart (JDE) d’avance (signe +) en 2022, entraînant des produits financiers de 8,5 M€ ;
- le champ n’intègre pas les exonérations non compensées ni les allégements généraux de cotisations (qui sont compensés par l’affectation de recettes fiscales jusqu’en 2010 s’agissant des allégements dits « Fillon » - et non par des dotations budgétaires). Il n’intègre pas les dettes ou les créances des mêmes partenaires vis-à-vis du régime des salariés agricoles financièrement intégré au régime général ;
- le coût ACOSS tient compte de la capitalisation quotidienne des intérêts depuis 2003 ainsi que du remboursement exceptionnel par l’État de 158 M€ en 2007 au titre de la compensation des intérêts induits par la dette de l’État fin 2006 ; en revanche, l’impact sur le profil ne tient pas compte du cumul des charges financières au titre des années antérieures ;
- le coût est calculé sur la base du coût de financement annuel moyen de l’ACOSS, soit Eonia + 13 bp (en moyenne : -0,331 %) en 2020, Eonia - 12 bp (en moyenne : -0,604 %) en 2021 et €STR – 18,3 bp (en moyenne -0.007 %) en 2022.
Si l’ACOSS a bénéficié depuis 2008 de la baisse des taux d’intérêt à court terme (l’Eonia est passé en moyenne de 3,86 % en 2008 à -0,01 % en 2022), la décroissance très importante des charges financières dues aux écarts à la neutralité depuis 2007 s’explique essentiellement par l’assainissement des relations financières entre l’État et les organismes de sécurité sociale. Pour 2022, le taux Eonia moyen négatif de -0,01 % s’est traduit, compte tenu de la marge de financement négative de 18,3 bp, par un prix moyen de -0,19 % permettant de dégager des produits financiers.
En 2022, la compensation ou le remboursement par l’État (dont le FNAL) ont été opérés avec une avance moyenne de 2 jours par rapport à la date de l’exonération de cotisations accordée aux entreprises ou de paiement des prestations par le régime général (contre 1 jour de retard en 2020 et 3 jours d’avance en 2021). Étant donné le taux moyen de financement négatif lors des périodes concernées, les financements nécessaires pour couvrir le flux de dette de l’État depuis 2015, en tenant compte des intérêts débiteurs capitalisés liés au stock de dette de l’État au titre des exercices antérieurs, ont induit des produits financiers – et donc un coût négatif – à hauteur de -8,5 M€.
Sur les exercices 2010 et antérieurs, la dette de l’État se traduisait pour l’ACOSS par une mobilisation complémentaire de financements afin d’équilibrer sa trésorerie (cf. graphique 1 sur l’impact quotidien des écarts à la neutralité sur le profil de trésorerie de l’ACOSS sur la période 2005-2022). Cette situation concernant l’État est en très nette amélioration depuis 2011 par rapport aux exercices 2010 et antérieurs (cf. graphique 2 sur l’évolution des dettes sur la période 2005-2022), ce qui résulte notamment des évolutions suivantes :
On observe sur le FSV, qui n’est pas habilité à emprunter, une amélioration sur l’exercice 2022, portant le montant moyen quotidien de dettes à 2,6 Md€, contre 6,7 Md€ en 2021. Il s’est ainsi écoulé en moyenne 78 jours entre les dépenses avancées par la branche retraite et les remboursements du FSV. Depuis 2016, le FSV est principalement financé par l'affectation de prélèvements sociaux dont les remontées sont constatées essentiellement sur les mois de septembre et octobre. Toutefois, du fait d’un coût de financement négatif, des produits financiers sont constatés pour 12,9 M€ (cf. supra, un signe négatif correspondant à un gain).
Concernant les départements, un remboursement doit être opéré chaque mois aux CAF au titre des prestations RSA versées par ces dernières le 5 de chaque mois. Ainsi, les CAF ont enregistré en 2022 un montant moyen quotidien de dettes de 0,7 Md€ ce qui s’est traduit pour l’ACOSS par un retard moyen de 24 jours (soit une dégradation par rapport à 2021) entre les prestations versées et les remboursements. De même, du fait d’un coût de financement négatif (cf. supra), des produits financiers sont constatés pour 1,4 M€.
Graphique 1 ● Compte ACOSS avec et hors dettes
En milliard d’euros
Source : ACOSS
Graphique 2 ●Évolution des dettes
Source : ACOSS
Note de lecture : le graphique met en évidence la dette de l’État, du FSV et des départements en trésorerie vis-à-vis du régime général. En moyenne sur l’année 2022, les versements de l’État ont été supérieurs de 0,3 Md€ aux dépenses.
Construction de l’indicateur
Il y a neutralité financière quand les dépenses opérées ou les pertes de cotisations subies par le régime général au titre d’un partenaire et leur remboursement par ce même partenaire ont lieu le même jour pour le même montant. Ce jour est la date de référence ; celle-ci peut différer de la date réglementaire (ou conventionnelle). A titre d’illustration, pour une prestation supportée par le régime général dont la date de versement aux prestataires serait fixée au 5 de chaque mois et dont la date de remboursement par l’État serait à échéance du 30 du mois considéré, il sera généré mécaniquement un écart à la neutralité financière de 25 jours.
Quand la neutralité financière n’est pas strictement respectée, l’Urssaf Caisse nationale emprunte, actuellement, auprès des marchés financiers sous forme de NeuCP (Negotiable EUropean Commercial Paper), anciennement billets de trésorerie, ou d’ECP (Euro Commercial Paper), la somme due par le partenaire de façon à ce que son compte bancaire soit équilibré. Cette « sur-mobilisation » (ou, symétriquement, ce moindre emprunt dans le cas d’anticipation de paiement) a un impact financier sur le régime général.
Le coût en termes d’intérêts d’emprunt, valorisé au taux de financement moyen annuel de l’Urssaf Caisse nationale (cf. indicateur n° 2-2), est évalué en fonction de la « sur-mobilisation » imputable au retard de paiement. Les variables retenues pour mesurer le principe de neutralité financière entre l’Urssaf Caisse Nationale et chaque partenaire sont les suivantes :
- la variable JDE correspond au nombre moyen de jours entre les dates de référence et les dates de paiement par le partenaire. Elle est négative quand le paiement a lieu en retard et positive quand le paiement est anticipé ;
- le coût pour l’Urssaf CN correspond à l’impact financier sur le régime général (avec capitalisation des intérêts) du fait de la « sur-mobilisation » de fonds. Il est indiqué en millions d’euros, un signe négatif indiquant un gain ;
- hors capitalisation des intérêts, l’impact annuel sur le profil traduit le montant moyen quotidien des besoins de financement en plus ou en moins induits par le non-respect de la neutralité financière par le partenaire. Il est indiqué en milliards d’euros.
Organisme responsable de la production de l’indicateur : Urssaf Caisse Nationale