Objectif n°2 : Veiller à l'équité du prélèvement social
Cet indicateur vise à analyser la façon dont les prélèvements sociaux varient en fonction du niveau de vie des ménages. Ces prélèvements se composent, d’une part, des cotisations patronales et, d’autre part, de l’ensemble des cotisations et contributions sociales (CSG, CRDS) portant sur les revenus des ménages. Les taux de prélèvement proportionnels aux revenus – éventuellement plafonnés – se justifient par la proportionnalité des revenus de remplacement (pensions de retraite et allocations chômage, indemnités journalières) et, en maladie, par l’objectif de solidarité excluant une tarification au risque. En outre, les politiques d’exonération de cotisations patronales sur les bas salaires et de solidarité (minima sociaux non soumis à cotisations et moindre imposition des revenus de remplacement) conduisent à réduire le niveau des prélèvements sociaux au bas de la distribution des revenus.
La part des prélèvements sociaux croît avec le niveau de vie, notamment pour les personnes les plus modestes (jusqu’au 4ème décile), en raison des allégements de charges patronales sur les bas salaires, qui s’éteignent progressivement au fur et à mesure que les salaires augmentent, et d’une plus forte concentration au bas de l’échelle des niveaux de vie des titulaires de revenus de remplacement, pour lesquels le poids des cotisations et contributions sociales est moindre. Ainsi, les cotisations patronales représentent en moyenne un montant équivalent à 5 % du niveau de vie des personnes situées au 1er décile, et jusqu’à 27 % du niveau de vie pour les personnes situées au-delà du 9ème décile. Les autres cotisations et les contributions sociales s’échelonnent, en moyenne, de 9 % du niveau de vie pour les personnes dont le niveau de vie est inférieur au premier décile à 25 % pour les personnes dont le niveau de vie est supérieur au neuvième décile.
Le montant des cotisations et contributions sociales rapporté au niveau de vie varie aussi selon la situation d’activité de la personne de référence : quand celle-ci occupe un emploi, les prélèvements sociaux représentent en moyenne un montant équivalent à 48 % du niveau de vie des personnes qui composent le ménage, alors qu’ils n’en représentent que 12 % quand la personne de référence est à la retraite. Cela s’explique par la nature des revenus perçus, qui ne donnent pas lieu aux mêmes taux de prélèvements sociaux. D’une part, les cotisations sociales suivent majoritairement une logique assurantielle (vieillesse, chômage) et portent donc essentiellement sur les revenus d’activité : ainsi, lorsque la personne de référence du ménage est retraitée, elle ne paie plus de cotisations. D’autre part, les taux de contribution sociale sont globalement plus faibles pour les revenus de remplacement (chômage et retraite) que pour les revenus d’activité, et ils peuvent en outre être réduits voire annulés en-deçà d’un certain niveau de ressources (exonérations de CSG et CRDS pour les bas revenus). Les contributions sociales pèsent donc moins fortement sur le niveau de vie des personnes sans emploi que sur celui des personnes qui travaillent.
Construction de l’indicateur :
Les éléments représentés par cette fiche ont été estimés à l’aide du modèle de microsimulation de la législation socio-fiscale Ines, développé conjointement par la Drees, l’Insee et la Cnaf. La législation socio-fiscale de 2022 a été appliquée à une population représentative, à cette date, des ménages résidant en logement ordinaire (c'est-à-dire ne vivant ni en habitation mobile ni en collectivité) en France métropolitaine. Le modèle Ines est adossé aux enquêtes de l’Insee sur les revenus fiscaux et sociaux (ERFS), qui apparient les caractéristiques sociodémographiques des ménages de l’Enquête Emploi aux fichiers administratifs de déclarations fiscales et sociales issus de la DGFiP, la Cnaf, la Cnav et la CCMSA.
Les prélèvements sociaux pris en compte sont les cotisations sociales à la charge des salariés, des non-salariés, des titulaires de revenus de remplacement et des employeurs, la contribution sociale généralisée (CSG), la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), divers prélèvements sur les revenus du patrimoine, la contribution exceptionnelle de solidarité pour les titulaires de la fonction publique ainsi que la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA). Les cotisations à la charge des employeurs ont été intégrées aux calculs car elles constituent une composante du financement des diverses prestations et de la rémunération totale du travail. Cela permet aussi de ne pas biaiser l’analyse selon que les ménages comportent des salariés ou des non-salariés. Par ailleurs, dans la mesure où les prestations de l’assurance maladie ne sont pas intégrées ici aux prestations sociales, les cotisations (salariales et patronales) et les contributions sociales qui les financent (une partie de la CSG) sont exclues du champ des prélèvements considérés. Les montants de cotisations sont donc comparables aux prestations versées.
Les prestations sociales prises en compte sont : les pensions de retraite (y compris rentes viagères à titre gratuit) et les allocations d’indemnisation du chômage relevant du régime d’assurance et du régime de solidarité ; les prestations dédiées à l’accueil du jeune enfant (Paje, y compris le complément de libre choix du mode de garde – CMG) ; les autres prestations familiales (allocations familiales, complément familial etc.), y compris les bourses de l’enseignement du second degré ; les aides personnelles au logement lorsque le ménage est locataire ou accédant à la propriété, les minima sociaux, la prime d’activité. L’aide exceptionnelle de solidarité (ou prime exceptionnelle de rentrée) est également intégrée à l’analyse dans l’édition 2024 ; elle a été versée en septembre 2022 aux ménages allocataires des minima sociaux et des aides au logement, ainsi que, pour un moindre montant, aux bénéficiaires de la prime d’activité. Cette aide équivaut à 100 € par foyer, auxquels sont ajoutés 50 € pour chaque enfant à charge.
Les prélèvements acquittés et les prestations reçues par les ménages sont ramenés en équivalent personne seule, en divisant les montants perçus par le nombre d’unités de consommation représentatif de la composition du ménage. On attribue une unité à la personne de référence du ménage, 0,5 unité aux autres personnes âgées de 14 ans et plus, et 0,3 unité aux enfants âgés de moins de 14 ans, selon l’échelle dite « de l’OCDE modifiée ». Les montants ainsi calculés expriment l’incidence, respectivement positive et négative, des prestations et des prélèvements sociaux sur le niveau de vie des personnes, rendus comparables malgré les différences de taille des ménages.
Précisions méthodologiques :
Le revenu disponible d'un ménage comprend les revenus d'activité, les revenus du patrimoine, les transferts en provenance d'autres ménages, les revenus de remplacement (notamment les pensions de retraite et les indemnités chômage), les prestations familiales et la majeure partie des prestations et minima sociaux, nets des cotisations, des impôts directs et des contributions sociales. Les prestations familiales incluent les bourses de l’enseignement secondaire et les aides à la garde, notamment le complément de libre choix du mode de garde (CMG). Le chèque énergie est également intégré à l’analyse, pour la première fois dans l’édition 2023. Les impôts directs pris en compte sont l'impôt sur le revenu et la taxe d'habitation. Les contributions sociales sont la contribution sociale généralisée (CSG), la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), divers prélèvements sur les revenus du patrimoine, la contribution exceptionnelle de solidarité pour les titulaires de la fonction publique ainsi que la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA).
Le niveau de vie d’un ménage et des personnes qui le composent correspond au revenu disponible du ménage rapporté au nombre d’unités de consommation (cf. ci-dessus). Le niveau de vie permet de comparer des ménages de taille différente ; il est le même pour toutes les personnes qui composent le ménage.
Pour le calcul des déciles, les individus sont classés du niveau de vie le plus faible au plus élevé, puis scindés en 10 groupes de même taille, des 10 % les plus modestes aux 10 % les plus aisés.
Organisme responsable de la production de l’indicateur : DREES