Objectif n°3 : Favoriser la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle
Le reste à charge et le taux d’effort des familles reflètent le coût associé à la garde d’un enfant : le reste à charge est composé des dépenses en matière de garde d’enfants restant à la charge des parents une fois toutes les aides publiques déduites ; le taux d’effort résulte du rapport entre ce reste à charge et les revenus du foyer. Ces indicateurs permettent aussi de rendre compte de l’impact des modifications récentes de la législation.
L’analyse par cas-type présentée ici permet d’estimer des indicateurs de reste à charge et de taux d’effort pour une famille avec un enfant de moins de 3 ans gardé selon cinq modes d’accueil : assistant maternel (AM), garde à domicile (GED) - partagée ou non -, micro-crèche (MC) financée par la PAJE et établissement d’accueil du jeune enfant (EAJE) financé par la prestation de service unique (PSU) 1.
Les crèches et micro-crèches sont des établissements d’accueil du jeune enfant (EAJE), quelles que soient leur modalité de financement. Par convention, dans cet indicateur, le terme micro-crèche désigne des établissements ayant opté pour un financement via le CMG de la PAJE et le terme EAJE regroupe les établissements financés par la PSU.
Graphique 1 ● Taux d'effort et reste à charge d'une garde d'un enfant selon le mode d’accueil et le niveau de revenu du foyer, en 2022
Source : Calculs Cnaf – DSS
Note de lecture : En 2022, pour un couple biactif disposant d'un revenu équivalent à 3 Smic et ayant un enfant de moins de 3 ans à charge, le reste à charge pour l’accueil en établissement d'accueil du jeune enfant (EAJE) s'élève à 284 €/mois, soit un taux d'effort de 7 %
La mise en place de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) en 2004 s’est accompagnée de diverses réformes de la fiscalité, visant à réduire la part financière restant à la charge des parents pour la garde de leur(s) enfant(s). Un objectif majeur de la création de la PAJE est de permettre aux parents de choisir librement le mode d’accueil de leur(s) enfant(s). Cet objectif impliquait de rapprocher les taux d’effort supportés par les familles pour les différents mode d’accueil formels et suivant leurs ressources, en particulier pour l’accueil entre EAJE et par assistante maternelle.
Les différences de taux d’effort et de reste à charge présentées ci-dessus résultent, d’une part, du coût brut de la garde, et, d’autre part, du degré de solvabilisation assuré par les dispositifs sociaux et fiscaux (versement de prestations par la branche famille – prestations légales pour l’accueil individuel et subventions au titre de l’action sociale de la branche famille versées aux gestionnaires de structures qui sont subordonnées à l’application d’un barème national de participation familiale pour l’accueil en EAJE – crédit d’impôt par l’État, et déduction forfaitaire de cotisations compensée par l’État).
Pour les parents les plus modestes (ressources équivalentes à 1 Smic), le taux d’effort est le plus faible dans le cadre du recours à une place en établissement d’accueil collectif (EAJE) : il est alors proche de 4 % pour un reste à charge mensuel de 63 € (cf. graphique 1). Ce coût est, a minima, deux fois moins élevé que celui d’un accueil individuel (AM ou GED) ou en micro-crèche PAJE, créant ainsi une forte incitation financière en faveur de l’accueil collectif (financé par la PSU) du point de vue des parents. Cette incitation est renforcée par le fait que la plupart des EAJE fournissent désormais les couches et les repas durant l’accueil, à la différence de l’accueil individuel pour lequel ce coût supplémentaire à la charge des parents n’a pas été intégré dans l’analyse (les couches et les repas sont par ailleurs pris en charge par l’établissement dans la majorité des cas pour ce qui est micro-crèches). Pour les couples biactifs avec 3 Smic de revenu, le reste à charge en l’EAJE (7 %) est plus faible qu’en micro-crèche PAJE (16 %).
L’accueil par un assistant maternel (AM) est le second mode d’accueil le moins onéreux pour les familles modestes. Il permet aux parents dont les ressources sont équivalentes à 1 ou 3 Smic de supporter un taux d’effort de respectivement 12 % et 9 % de leurs revenus pour un reste à charge respectivement de 175 € et 346 € en 2022 pour un couple, 132 € et 252 € pour un parent isolé (correspondant à un taux d’effort respectif de 9 % et 6 %).
L’accueil en micro-crèche (MC), lorsque celle-ci opte pour un financement direct des parents percevant le complément mode de garde (CMG) de la PAJE, se situe entre l’accueil par un assistant maternel et l’emploi d’un salarié à domicile en termes de taux d’effort pour les familles. Pour les couples les plus modestes, les taux d’effort associés à la micro-crèche sont plus importants de 21 points et 7 points que ceux associés à un assistant maternel (parents rémunérés, respectivement, à 1 et 3 Smic).
En revanche, quelle que soit la configuration familiale, l’emploi d’un salarié à domicile demeure très onéreux pour les familles lorsque la garde ne concerne qu’un enfant âgé de moins de trois ans et n’est pas partagée (79 % du revenu mensuel pour une famille percevant un revenu de 1 Smic). Ce mode de garde - minoritaire par rapport à l’accueil par un AM ou en EAJE - est ainsi majoritairement utilisé par des foyers aisés : l’accès à une garde à domicile à temps plein est en effet difficilement envisageable pour les foyers percevant moins de 3 Smic. Le taux d’effort est proche de 34 % lorsque les ressources du couple atteignent 3 Smic, et s’élève à près de 23 % au niveau de 5 Smic. La garde à domicile, lorsqu’elle concerne plusieurs enfants âgés de moins de trois ans ou qu’elle est partagée, permet cependant aux familles les plus aisées de réduire significativement leur taux d’effort, à un niveau équivalent à celui d’une place en crèche pour des foyers disposant de ressources comprises entre 3 et 5 Smic. Ce mode d’accueil est essentiellement concentré en région parisienne.
Le taux d’effort est contenu à un niveau inférieur à 18 % des ressources de la famille, quels que soient ses revenus et le mode d’accueil, à l’exception de la garde à domicile lorsqu’elle n’est pas partagée et de l’accueil en micro-crèche. En 2019 et 2020, les prestations familiales ont été revalorisées de 0,3 % dans le cadre de la mesure de revalorisation maîtrisée, alors que le Smic brut a progressé de 1,5 % et 1,2 % sur ces deux années. Cela a conduit à une augmentation relative du coût de la garde et donc des taux d’effort associés à chacun des modes d’accueil solvabilisés par le CMG. Selon les hypothèses retenues, le taux d’effort relatif à l’accueil par un AM continue d’augmenter en 2022 sous l’effet de l’inflation dynamique qui caractérise cette année et d’une hypothèse de progression du salaire net moyen des assistants maternels supérieure à la revalorisation des barèmes de prise en charge de la PAJE. Il reste toutefois proche de 12 % pour une famille gagnant 1 Smic.
Le taux d’effort des familles pour un accueil en micro-crèche reste élevé en 2022, pour les familles ayant 1 Smic de revenus, mais reste stable pour les familles ayant des niveaux de revenus plus élevés (3 et 5 Smic). Ceci est lié à une progression du coût horaire de l’accueil plus rapide que celle du Smic, qui touche davantage les familles à faibles revenus.
Dans les EAJE financés par la PSU, la participation, et donc le taux d‘effort des familles, sont déconnectés du coût des structures et sont seulement fonction de leurs revenus. Dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion entre l’Etat et la Cnaf 2018-2022 a été prévu une augmentation du taux des participations familiales de 0,8 % par an à compter de 2019 et jusqu’en 2022. Le plafond augmente par ailleurs progressivement pour atteindre 6 000 € (contre 4 875 € en 2018). Cette réforme a pour effet d’augmenter le financement relatif des familles, notamment de celles ayant des revenus élevés et qui auraient été plafonnées par le passé. Ceci explique l’augmentation du taux d’effort de 1 point entre 2015 et 2021 pour les familles ayant des revenus équivalents à 5 Smic (cf. graphique 2).
Graphique 2 ● Taux d'effort relatif à la garde d'un enfant selon le mode d’accueil et le niveau de revenu
Source : Calculs Cnaf – DSS
Note de lecture : En 2022, pour un couple biactif disposant d’un revenu équivalant à 3 Smic et ayant un enfant de moins de 3 ans à charge, le taux d’effort pour la garde en établissement d’accueil du jeune enfant s’élève à 7 %
Construction de l’indicateur
Les cas-types sont construits pour illustrer deux situations familiales théoriques spécifiques :
- un couple dont les deux membres travaillent avec un enfant de moins de trois ans, pour lequel sont présentés 3 niveaux de revenus (1, 3 et 5 Smic brut), en considérant que les revenus du couple se partagent à parts égales entre les 2 parents ;
- une famille monoparentale avec un enfant de moins de trois ans né après le 1er avril 2018, pour laquelle sont présentés 2 niveaux de revenus équivalent à 1 et 3 Smic brut.
Les cas types décrivent les dépenses occasionnées par un accueil à temps plein (soit 9 heures par jour et 18 jours par mois) de l’unique enfant au 1er juillet de l’année considérée pour les années 2010, 2015, 2021 et 2022 selon cinq modes d’accueil : assistant maternel, garde à domicile, garde à domicile partagée, micro-crèche financée dans le cadre de la PAJE et accueil collectif en établissement d’accueil du jeune enfant financé dans le cadre de la PSU. La garde à domicile partagée consiste à employer une personne qui garde deux enfants de familles différentes, le coût pour une famille correspond alors à un emploi à mi-temps.
L’indicateur retrace, pour chaque mode d’accueil, l’évolution des coûts de l’accueil agrégés, pris en charge par les différents financeurs publics : les CAF, l’Etat et les collectivités locales. Les participations financières estimées résultent ensuite de la prise en compte des montants du CMG de la PAJE pour l’ensemble de l’année en cours ainsi que des plafonds en vigueur au 1er janvier.
Concernant les dispositifs fiscaux, les familles sont éligibles au crédit d’impôt relatif à l’emploi d’une garde d’enfant à domicile et à la garde hors du domicile (assistant maternel et EAJE). Ainsi, le reste à charge correspondant à un accueil réalisé l’année N inclut par anticipation l’avantage fiscal que le ménage obtient l’année N+1.
Depuis le PQE (ancien nom du REPSS) annexé au PLFSS 2017, le calcul de la prise en charge publique du coût de la garde à domicile intègre la déduction forfaitaire de cotisations sociales entrée en vigueur en 2013. Cette déduction a été portée à 2 € par heure travaillée à compter du 1er décembre 2015 et porte sur la part des cotisations de Sécurité sociale non prise en charge par la branche famille (cf. Tableau infra).
La tarification des EAJE correspond au barème national des participations familiales fixé par la Cnaf. Le montant de la Psu qui est versé varie en fonction du niveau de service rendu aux familles, évalué au regard de la fourniture des repas et des couches, et de l’adaptation aux besoins réels des familles (mesurée notamment par un faible écart entre les heures facturées et les heures consommées par les familles). Le prix plafond retenu pour le calcul du présent indicateur est celui applicable à un EAJE dont le niveau de service se situe dans la catégorie 2 (établissement ne fournissant pas les couches ni les repas, dont le taux de facturation est inférieur ou égal à 107 %) ou dans la catégorie 3 (établissement fournissant les couches et les repas), dont le taux de facturation est compris entre 107 % et 117 %), soit 8,10 € par heure en 2022.
Les salaires des assistants maternels et des personnes employées pour une garde à domicile sont estimés à partir du salaire horaire réel net moyen calculé par l’ACOSS.
La tarification en micro-crèche est calculée avec le prix horaire moyen facturé par les micro-crèches PAJE à partir des dépenses de garde déclarées par les allocataires du CMG structure.
Le prix de revient est calculé sur les équipements d’accueil collectif accueillant uniquement des enfants de moins de 3 ans en métropole, il tient compte de l’ensemble des heures payées par les parents.
Les coûts de l’accueil peuvent ainsi être modifiés par rapport aux PQE/REPSS annexés aux précédents PLFSS, du fait de la mise à jour des séries de coût horaire moyen de l’accueil individuel (assistant maternel et salarié à domicile) et des prix de revient horaires des équipements d’accueil collectif.
Les cas-types 2022 sont construits sur des hypothèses provisoires de progression des prix et des salaires. Ils n’intègrent pas la hausse de 4% des prestations sociales au 1er juillet 2022 votée dans le cadre de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.
Précisions méthodologiques
L’estimation retient un accueil d’enfant à temps plein pendant un mois, ce qui conduit à surestimer les coûts et les taux d’effort effectifs des familles. En effet, l’accueil du jeune enfant est un service utilisé généralement de façon moins fréquente et moins intensive.
Précisions sur la législation fiscale L’utilisation d’un mode d’accueil à domicile ou à l’extérieur du domicile donne droit à un crédit d’impôt au taux de 50 %.
Par ailleurs, depuis 2013, les familles employant un salarié à domicile bénéficient d’une déduction de cotisations sociales de 0,75 € par heure travaillée. Cette déduction a été portée à 2 € par heure travaillée à compter du 1er décembre 2015. Enfin, entre 2006 et 2010, les cotisations sur l’assiette réelle des rémunérations d’un salarié à domicile ouvraient droit à un abattement de 15 % du salaire brut de l’employé au bénéfice des employeurs.
(*) Ce plafond annuel de dépense s'applique à l'ensemble des salariés employés à domicile et non exclusivement à l'emploi d'une garde d'enfant à domicile.
Organisme responsable de la production de l’indicateur : DSS