Objectif n°3 : Favoriser la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle
Le reste à charge et le taux d’effort des familles reflètent les dépenses nettes des familles induites par l’accueil d’un enfant : le reste à charge est composé des dépenses en matière de garde d’enfants restant à la charge des parents une fois toutes les aides publiques déduites ; le taux d’effort résulte du rapport entre ce reste à charge et les revenus du foyer. Ces indicateurs permettent de rendre compte de l’impact des modifications récentes de la législation.
L’analyse par cas-type présentée ici permet d’estimer des indicateurs de reste à charge et de taux d’effort pour une famille avec un enfant de moins de 3 ans gardé selon quatre modes d’accueil : assistant maternel (AM), garde à domicile (GED) - partagée ou non - et établissement d’accueil du jeune enfant (EAJE) financé par la prestation de service unique (PSU) . Tous les cas-types sont présentés pour un accueil à temps plein.
Graphique 1 ● Taux d'effort et reste à charge induit par l’accueil d'enfant à temps plein, selon le mode et les revenus du foyer, en 2023
Source : Calculs Cnaf – DSS
Note de lecture : En 2023, pour un couple biactif disposant d'un revenu équivalent à 3 Smic et ayant un enfant de moins de 3 ans à charge, le reste à charge pour l’accueil en établissement d'accueil du jeune enfant (EAJE) s'élève à 240 €/mois, correspondant à un taux d'effort de 6 %.
La mise en place de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) en 2004 s’est accompagnée de réformes de la fiscalité, visant à réduire la part financière restant à la charge des parents pour l’accueil de leur(s) enfant(s). Un objectif majeur de la création de la PAJE est de rapprocher les taux d’effort supportés par les familles pour les différents modes d’accueil formels et suivant leurs ressources, en particulier pour l’accueil entre EAJE et par assistante maternelle, afin que le reste à charge ne soit pas un frein dans le libre choix du mode d’accueil de l’enfant. Plus récemment, La LFSS 2023 prévoit une réforme du financement des modes d’accueil par des assistants maternels et des gardes d'enfants à domicile. Aussi, à partir de 2025, la participation de la CNAF sera linéarisée, sur un modèle équivalent à celui du financement des EAJE, ce qui réduira les écarts de reste-à-charge selon le mode d’accueil.
L’accueil en EAJE est, en 2023, deux fois moins onéreux que l’accueil individuel pour les familles modestes
Les différences de taux d’effort et de reste à charge présentées ci-dessus résultent, d’une part, du coût brut de l’accueil, et, d’autre part, du degré de solvabilisation assuré par les dispositifs sociaux et fiscaux : versement de prestations par la branche famille – prestations légales pour l’accueil individuel et subventions au titre de l’action sociale de la branche famille versées aux gestionnaires de structures qui sont subordonnées à l’application d’un barème national de participation familiale pour l’accueil en EAJE – crédit d’impôt par l’État, et déduction forfaitaire de cotisations compensée par l’État.
Pour les parents les plus modestes (ressources équivalentes à 1 Smic), le taux d’effort est le plus faible dans le cadre du recours à une place en établissement d’accueil collectif (EAJE) : il est alors proche de 4 % pour un reste à charge mensuel de 64 € (cf. graphique 1). Ce coût est, a minima, deux fois moins élevé que celui d’un accueil individuel (AM ou GED), créant ainsi une forte incitation financière en faveur de l’accueil collectif (financé par la PSU) du point de vue des parents. Cette incitation est renforcée par le fait que la plupart des EAJE fournissent désormais les couches et les repas durant l’accueil, à la différence de l’accueil individuel pour lequel ce coût supplémentaire à la charge des parents n’a pas été intégré dans l’analyse. Pour les couples biactifs avec 3 Smic de revenu, le reste à charge en l’EAJE (6 %) est plus faible qu’en accueil individuel avec une assistante maternelle (7 %).
L’accueil par un assistant maternel (AM) est le second mode d’accueil le moins onéreux pour les familles modestes. Il permet aux parents de supporter un taux d’effort de 5 % à 11 % selon leurs ressources, pour un reste à charge respectivement de 178 € et 304 € en 2023 pour un couple, 134 € et 224 € pour un parent isolé (correspondant à un taux d’effort respectif de 9 % et 5 %).
Quelle que soit la configuration familiale, l’emploi d’un salarié à domicile demeure très onéreux pour les familles lorsque l’accueil ne concerne qu’un enfant âgé de moins de trois ans et n’est pas partagée (76 % du revenu mensuel pour un couple percevant un revenu de 1 Smic). Ce mode d’accueil - minoritaire par rapport à l’accueil par une AM ou en EAJE - est ainsi majoritairement utilisé par des foyers aisés : l’accès à une garde à domicile à temps plein est en effet difficilement envisageable pour les foyers percevant moins de 3 Smic. Le taux d’effort est proche de 33 % lorsque les ressources du couple atteignent 3 Smic, et s’élève à près de 22 % au niveau de 5 Smic. La garde à domicile, lorsqu’elle concerne plusieurs enfants âgés de moins de trois ans ou qu’elle est partagée, permet cependant aux familles les plus aisées de réduire significativement leur taux d’effort, à un niveau équivalent à celui d’une place en crèche pour des foyers disposant de ressources comprises entre 3 et 5 Smic. Ce mode d’accueil est essentiellement concentré en région parisienne.
Un taux d’effort des familles en baise pour les assistantes maternelles et les établissement d’accueil du jeune enfant
Le taux d’effort est contenu à un niveau inférieur à 18 % des ressources de la famille, quels que soient ses revenus et le mode d’accueil, à l’exception de la garde à domicile lorsqu’elle n’est pas partagée et de l’accueil en micro-crèche. En 2019 et 2020, les prestations familiales ont été revalorisées de 0,3 % dans le cadre de la mesure de revalorisation maîtrisée, alors que le Smic brut a progressé de 1,5 % et 1,2 % sur ces deux années. Cela a conduit à une augmentation relative du coût de l’accueil et donc des taux d’effort associés à chacun des modes d’accueil solvabilisés par le CMG. Selon les hypothèses retenues, le taux d’effort relatif à l’accueil par un AM enregistre une baisse en 2023 sous l’effet de l’inflation qui caractérise cette année et d’une hypothèse de progression du salaire net moyen des assistants maternels inferieur à la revalorisation des barèmes de prise en charge de la PAJE. Il reste toutefois proche de 11 % pour une famille gagnant 1 Smic.
Dans les EAJE financés par la PSU, la participation, et donc le taux d‘effort des familles, sont déconnectés du coût des structures et sont seulement fonction de leurs revenus. Dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion entre l’Etat et la Cnaf 2018-2022, une augmentation du taux des participations familiales de 0,8 % par an a eu lieu entre 2019 et 2022. Le plafond a augmenté progressivement pour atteindre 6 000 € (contre 4 875 € en 2018). Cette réforme a eu pour effet d’augmenter le financement relatif des familles, notamment de celles ayant des revenus élevés et qui auraient été plafonnées par le passé. La fin de la mise en place de cette réforme en 2022, explique la réduction du taux d’effort de 1 point entre 2022 et 2023 pour les familles ayant des revenus équivalents à 3 et 5 Smic (cf. graphique 2), dès lors que leurs revenus augmentent par rapport au plafond de participation fixé par la CNAF.
Graphique 2 ● Taux d'effort relatif à l’accueil d'un enfant selon le mode et le niveau de revenu
Assistant Maternel | Établissement d'accueil du jeune enfant |
Garde à domicile partagée | Garde à domicile |
Source : Calculs Cnaf – DSS
Note de lecture : En 2023, pour un couple biactif disposant d’un revenu équivalant à 3 Smic et ayant un enfant de moins de 3 ans à charge, le taux d’effort pour l’accueil en établissement d’accueil du jeune enfant s’élève à 6 %.
Construction de l’indicateur
Les cas-types sont construits pour illustrer deux situations familiales théoriques spécifiques :
- un couple dont les deux membres travaillent avec un enfant de moins de trois ans, pour lequel sont présentés 3 niveaux de revenus (1, 3 et 5 Smic brut), en considérant que les revenus du couple se partagent à parts égales entre les 2 parents ;
- une famille monoparentale avec un enfant de moins de trois ans né après le 1er avril 2018, pour laquelle sont présentés 2 niveaux de revenus équivalent à 1 et 3 Smic brut.
Les cas types décrivent les dépenses occasionnées par un accueil à temps plein (soit 9 heures par jour et 18 jours par mois) de l’unique enfant au 1er juillet de l’année considérée pour les années 2010, 2015, 2022 et 2023 selon quatre modes d’accueil : assistant maternel, garde à domicile, garde à domicile partagée et accueil collectif en établissement d’accueil du jeune enfant financé dans le cadre de la PSU. La garde à domicile partagée consiste à employer une personne qui garde deux enfants de familles différentes, le coût pour une famille correspond alors à un emploi à mi-temps.
L’indicateur retrace, pour chaque mode d’accueil, l’évolution des coûts de l’accueil agrégés, pris en charge par les différents financeurs publics : les CAF, l’Etat et les collectivités locales. Les participations financières estimées résultent ensuite de la prise en compte des montants du CMG de la PAJE pour l’ensemble de l’année en cours ainsi que des plafonds en vigueur au 1er janvier.
Concernant les dispositifs fiscaux, les familles sont éligibles au crédit d’impôt relatif à l’emploi d’une garde d’enfant à domicile et à l’acueil hors du domicile (assistant maternel et EAJE). Ainsi, le reste à charge correspondant à un accueil réalisé l’année N inclut par anticipation l’avantage fiscal que le ménage obtient l’année N+1.
Depuis le PQE (ancien nom du REPSS) annexé au PLFSS 2017, le calcul de la prise en charge publique du coût de la garde à domicile intègre la déduction forfaitaire de cotisations sociales entrée en vigueur en 2013. Cette déduction a été portée à 2 € par heure travaillée à compter du 1er décembre 2015 et porte sur la part des cotisations de Sécurité sociale non prise en charge par la branche famille (cf. Tableau infra).
La tarification des EAJE correspond au barème national des participations familiales fixé par la Cnaf. Le montant de la PSU qui est versé varie en fonction du niveau de service rendu aux familles, évalué au regard de la fourniture des repas et des couches, et de l’adaptation aux besoins réels des familles (mesurée notamment par un faible écart entre les heures facturées et les heures consommées par les familles). Le prix plafond retenu pour le calcul du présent indicateur est celui applicable à un EAJE dont le niveau de service se situe dans la catégorie 2 (établissement ne fournissant pas les couches ni les repas, dont le taux de facturation est inférieur ou égal à 107 %) ou dans la catégorie 3 (établissement fournissant les couches et les repas, dont le taux de facturation est compris entre 107 % et 117 %), soit 8,98 € par heure en 2023.
Les salaires des assistants maternels et des personnes employées pour une garde à domicile sont estimés à partir du salaire horaire réel net moyen calculé par l’ACOSS.
Le prix de revient est calculé sur les équipements d’accueil collectif accueillant uniquement des enfants de moins de 3 ans en métropole, il tient compte de l’ensemble des heures payées par les parents.
Les coûts de l’accueil peuvent ainsi être modifiés par rapport aux PQE/REPSS annexés aux précédents PLFSS, du fait de la mise à jour des séries de coût horaire moyen de l’accueil individuel (assistant maternel et salarié à domicile) et des prix de revient horaires des équipements d’accueil collectif.
Précisions méthodologiques
L’estimation retient un accueil d’enfant à temps plein pendant un mois, ce qui conduit à surestimer les coûts et les taux d’effort effectifs des familles. En effet, l’accueil du jeune enfant est un service utilisé généralement de façon moins fréquente et moins intensive.
Le taux d'effort est le rapport entre le reste à charge des familles et leur revenu net estimé pour l'année analysée. L'allocation de base, lorsque la situation familiale y ouvre droit, est intégrée comme un revenu.
Concernant l’accueil en micro-crèche (MC), l’absence de données robustes sur le prix de revient d’une heure d’accueil ne rend pas possible l’estimation d’un coût mensuel ni d’un reste à charge pour la famille comparable avec les autres modes d’accueil, car les participations des employeurs ne sont pas disponibles.
Précisions sur la législation fiscale
L’utilisation d’un mode d’accueil à domicile ou à l’extérieur du domicile donne droit à un crédit d’impôt au taux de 50 % dans la limite d’un plafond. Le montant maximum de crédit d’impôt est passé de 1 150€ par an à 3 500€ par an en 2023.
Par ailleurs, depuis 2013, les familles employant un salarié à domicile bénéficient d’une déduction de cotisations sociales de 0,75 € par heure travaillée. Cette déduction a été portée à 2 € par heure travaillée à compter du 1er décembre 2015. Enfin, entre 2006 et 2010, les cotisations sur l’assiette réelle des rémunérations d’un salarié à domicile ouvraient droit à un abattement de 15 % du salaire brut de l’employé au bénéfice des employeurs.
(*) Ce plafond annuel de dépense s'applique à l'ensemble des salariés employés à domicile et non exclusivement à l'emploi d'une garde d'enfant à domicile.
Organisme responsable de la production de l’indicateur : DSS