Objectif n°2 : Aider davantage les familles vulnérables
Cet indicateur vise à mesurer l’impact des prestations familiales, des minimas sociaux, de la prime d’activité et des aides au logement sur le taux de pauvreté des enfants au sein des ménages.
Le tableau 1 présente des simulations d’évolution du taux de pauvreté des enfants de moins de 18 ans en 2022 après prise en compte successive des diverses composantes du système socio-fiscal. L’analyse est présentée ici en écarts car les indicateurs de revenu et de pauvreté en niveaux estimés par le modèle de micro-simulation Ines peuvent diverger par rapport aux chiffres officiels de l’Insee (cf. précisons méthodologiques). Le seuil de pauvreté considéré, égal à 60 % du niveau de vie médian de la population après redistribution, est identique pour toutes les colonnes du tableau :
Tableau 1 ● Effet des prélèvements et prestations sociales sur le taux de pauvreté monétaire des enfants, en fonction de la configuration familiale , en 2022
Source : Insee, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2020 (actualisée 2022) ; modèle Ines 2022, calculs Drees.
Champ : enfants âgés de moins de 18 ans appartenant à des ménages vivant en logement ordinaire, en France métropolitaine, dont le revenu déclaré au fisc est positif ou nul et dont la personne de référence n’est pas étudiante et a moins de 60 ans. Concernant les catégories par configuration familiale, seuls les enfants âgés de moins de 21 ans au 31/12/2021 sont pris en compte. Les ménages avec enfants de 21 ans ou plus sont intégrés uniquement dans la rubrique 'Ensemble'. Pour plus de détails sur le niveau de vie, se reporter aux définitions de l’indicateur n°2-1.
Note de lecture : après impôt sur le revenu, le taux de pauvreté des enfants âgés de moins de 18 ans reste stable ; il baisse de 7,2 points après prestations familiales puis de 2,1 points après intégration des aides au logement. Après prise en compte de l'ensemble des transferts (prime d'activité, minima sociaux), le taux de pauvreté des enfants âgés de moins de 18 ans diminue de 1,6 point. Enfin l'aide exceptionnelle de solidarité de 2022 diminue le taux de pauvreté monétaire des enfants de 0,2 point. Au total, les prélèvements et prestations font baisser le taux de pauvreté des enfants âgés de moins de 18 ans de 14,3 points. On ne mesure pas l’effet des aides sur la réduction de la pauvreté indépendamment les unes des autres mais l’effet supplémentaire de chacune d’elles après prise en compte des précédentes.
Les prestations familiales ont un rôle protecteur contre la pauvreté monétaire. Toutes configurations familiales confondues, elles abaissent en moyenne le taux de pauvreté des enfants de 7,2 points. Leur effet est particulièrement fort au sein des couples ayant au moins trois enfants, pour lesquels le taux de pauvreté diminue de 13,2 points après prise en compte des prestations familiales dans le revenu disponible ; le taux de pauvreté des enfants diminue également d’une même ampleur au sein des familles monoparentales de deux enfants ou plus (-13,3 points).
Ajoutées aux prestations familiales, les autres prestations (aides au logement, prime d’activité, minima sociaux et aide exceptionnelle de solidarité) contribuent également à réduire le taux de pauvreté des enfants, de 14,3 points. Cet effet est plus important pour les enfants de familles monoparentales ; le taux de pauvreté des enfants baisse notamment sous l’effet des aides au logement (-6,6 points pour les familles monoparentales avec un enfant et -4,8 points pour celles avec deux enfants) et de la prime d’activité (respectivement - 7,6 et -5,2 points). Le revenu de solidarité active (RSA) a, quant à lui, un effet modéré sur le taux de pauvreté des enfants, car le montant minimum garanti par le RSA reste en-dessous du seuil de pauvreté. Le schéma ci-dessous illustre l’effet des différentes prestations sur le niveau de vie d’un couple avec 2 enfants (11 à 12 ans), locataire de sa résidence principale, en fonction de ses revenus d’activité.
Schéma 1 ● Impact des prestations sur le niveau de vie pour un couple avec deux enfants
Source : cas-types, barèmes juillet 2020, calculs CNAF.
Note : Seuil de pauvreté en part de Smic déterminé en rapportant le seuil de pauvreté 2018 (INSEE) au smic net 2018.
1 Il est supposé qu’il y a un seul travailleur pour un revenu d’activité allant jusqu’à 100 % du Smic. Au-delà, l’un des conjoints perçoit le Smic à temps plein et l’autre le différentiel de revenu salarial. Précisions méthodologiques complémentaires disponibles dans l’indicateur n°1-7.
Construction de l’indicateur
Les données présentées ci-dessus ont été estimées à l’aide du modèle de microsimulation Ines, géré conjointement par la Drees, l’Insee et la Cnaf. Elles résultent de calculs réalisés par la Drees à partir du modèle Ines 2022. Les barèmes de la législation 2022 ont été appliqués à une population représentative, à cette date, des ménages vivant en logement ordinaire (c’est-à-dire ne résidant ni en habitation mobile, ni en collectivité) en France métropolitaine. Le modèle Ines est adossé aux enquêtes de l’Insee sur les revenus fiscaux et sociaux (ERFS), qui apparient les caractéristiques socio-démographiques des ménages de l’enquête emploi aux fichiers administratifs de déclarations fiscales et sociales issus de la DGFiP, la Cnaf, la Cnav et la CCMSA. Il s’agit ici de l’ERFS 2020 actualisée pour l’année 2022.
Pour l’analyse par configuration familiale, les enfants à charge sont définis au sens de la Cnaf : ils sont âgés de moins de 21 ans (âge limite pour le complément familial et les aides au logement) et ne doivent pas percevoir un salaire supérieur à 55 % du Smic brut. Les enfants vivant dans des ménages « complexes » (notamment ceux avec enfants de 21 ans ou plus) sont pris en compte dans la rubrique ‘Ensemble’ uniquement.
Précisions méthodologiques
Le seuil de pauvreté monétaire est défini au niveau européen à 60 % du niveau de vie médian de l’ensemble des personnes. Le niveau de vie médian est le niveau de vie après transferts qui partage la population en deux : la moitié des personnes dispose d’un niveau de vie inférieur au niveau de vie médian et l’autre moitié dispose d’un niveau de vie supérieur. Dans cette fiche, seules les personnes qui vivent dans des ménages dont la personne de référence a moins de 60 ans sont prises en compte pour le calcul du seuil de pauvreté.
Le taux de pauvreté des enfants correspond à la proportion d’enfants de moins de 18 ans dont le niveau de vie (y compris aides à la garde, bourses de l’enseignement secondaire et chèque énergie) est inférieur au seuil de pauvreté.
Le taux de pauvreté est présenté ici uniquement en écart, après chaque bloc de prélèvement ou de prestation. En effet, les taux de pauvreté issus du modèle Ines, dits « simulés », sont calculés à partir de niveaux de vie dont les composantes (en dehors des revenus déclarés à l’administration fiscale) sont simulées : les prélèvements et prestations sont automatiquement attribués aux ménages en cas d’éligibilité et après calcul de leurs droits en fonction des revenus déclarés (en dehors du RSA et de la prime d’activité pour laquelle un comportement global de non-recours est simulé, cf. indicateur 2-1). Il faut le distinguer du taux de pauvreté publié annuellement par l’Insee, obtenu à partir de la collecte de toutes les informations administratives nécessaires et sur un champ différent (puisqu’il porte sur l’ensemble de la population et n’intègre pas le complément de libre choix du mode de garde, ni les bourses du secondaire, ni le chèque énergie). Par ailleurs, le taux de pauvreté simulé ne tient pas entièrement compte du décalage temporel existant dans la réalité entre la perception des revenus et le versement des prestations correspondantes : dans la réalité, les droits à prestations sont généralement calculés par rapport à l’état des revenus perçus deux ans auparavant, quelle que soit la situation courante (sauf en cas de perte substantielle de revenu), alors que dans le modèle Ines, les prestations sont simulées en considérant qu’il n’y a pas eu de changement de situation sur 2 ans, en dehors d’une évolution éventuelle de revenu conforme à celle observée en moyenne par grande catégorie. Du fait de ces différences, pour une année donnée, entre taux de pauvreté simulé et observé, l’analyse est donc conduite ici en différence de taux de pauvreté, ce qui permet de raisonner à limite du modèle constante et donc ne prendre en compte que l’effet respectif de chaque prélèvement et prestation.
Pour rendre compte de la situation initiale des ménages, avant le bénéfice éventuel des transferts monétaires liés à la politique familiale, sont retenus ici les revenus nets des cotisations, contributions sociales (CSG, CRDS) et de l’impôt sur le revenu. Ce revenu rapporté au nombre d’unités de consommation (UC) du ménage constitue le niveau de vie initial du ménage. Les unités de consommation (UC) sont définies selon l'échelle dite de l’OCDE modifiée.
Le type de famille retenu est celui au sens des prestations familiales. Un couple est formé de deux conjoints, mariés ou non, et cohabitant. Les enfants sont les enfants à charge de moins de 21 ans. Les ménages ne correspondant pas à cette typologie (notamment ceux avec enfants de 21 ans ou plus), dits « complexes », ne sont pas traités ici.
Le champ de la politique familiale comprend ici l’ensemble des prestations familiales, des minimas sociaux, de la prime d’activité et des aides personnelles au logement, mais ne tient pas compte de l’impôt sur le revenu. Par définition, les prestations familiales sont destinées aux seules familles et visent à compenser en partie les charges liées à l’entretien et à l’éducation des enfants. Les prestations familiales comprennent des prestations attribuées sans condition de ressources (AF, ASF, AEEH, PreParE, complément de libre choix du mode de garde – CMG –) et des prestations versées sous conditions de ressources (CF, allocation de base et prime à la naissance de la Paje, ARS, bourses de l’enseignement du second degré). Les minima sociaux (RSA, AAH et ses compléments), la prime d’activité et les aides au logement à destination des locataires ne sont pas uniquement destinés aux ménages avec enfants mais comportent, dans leurs barèmes, une dimension fortement familialisée. Il est donc utile d’étudier l’effet de ces transferts sur le niveau de vie des ménages, même si la composante liée aux seules charges de famille ne peut être isolée ici. Il en va de même pour l’aide exceptionnelle de solidarité (ou prime exceptionnelle de rentrée) qui a été versée en septembre 2022 aux ménages allocataires des minima sociaux et des aides au logement, ainsi que, pour un moindre montant, aux bénéficiaires de la prime d’activité. Cette aide équivaut à 100 € par foyer, auxquels sont ajoutés 50 € pour chaque enfant à charge.
Organisme responsable de la production de l’indicateur : DREES