Cette fiche présente les principales différences dans le calcul des prestations, selon que le sinistre soit reconnu comme professionnel (et donc pris en charge au titre des AT-MP), ou non (auquel cas la prise en charge relève du droit commun, et donc de l’assurance maladie). La fiche se focalise sur les salariés du secteur privé, rattachés au régime général de sécurité sociale, ou à la mutualité sociale agricole (MSA).

La présomption d’imputabilité, contrepartie de l’immunité civile de l’employeur et d’une réparation non intégrale du préjudice

La protection des salariés en cas d’accident du travail ou maladie professionnelle est le premier risque qui a été assuré historiquement et cela, dès 1898. Cette loi relative aux responsabilités des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail, prévoyait le versement d’une rente calculée en fonction de l’incapacité (absolue, partielle, temporaire) du salarié. Lorsque l’accident était suivi de mort, une pension était versée au conjoint, aux descendants ou ascendants du salarié. En outre, l’employeur supportait les frais médicaux, pharmaceutiques et funéraires dans la limite d’un plafond.
La prise en charge des AT-MP aujourd’hui résulte d’un compromis historique entre organisations de salariés et d’employeurs : en échange d’une présomption d’imputabilité des sinistres dans le cadre des accidents ou des tableaux de maladie professionnelle, la réparation des préjudices est forfaitaire  (et non intégrale) et l’employeur bénéficie d’une immunité civile, sauf en cas de faute intentionnelle ou inexcusable.
Ainsi, lorsque le caractère professionnel de la maladie ou de l’accident est reconnu par sa caisse primaire d’assurance maladie, la victime bénéficie d’une prise en charge à 100 % des dépenses de soins (150 % dans certains cas) et, en cas d’arrêt de travail, d’indemnités journalières majorées comparativement à une maladie ordinaire (Réparation intégrale, FIVA, CAP AT/MP – Revue Regards n°51). En outre elle peut percevoir, en cas d’incapacité permanente, un capital ou une rente selon le taux de déficit constaté depuis la date de consolidation de la maladie  (cf. indicateur 1.2.1).

La gratuité des frais de santé

La feuille d'accident, remise par l’employeur, permet de bénéficier de la gratuité des soins liés au sinistre reconnu en AT-MP, sur la base et dans la limite des tarifs de la sécurité sociale. Celle-ci doit être présentée à chaque professionnel de santé consulté qui y mentionne les actes effectués. Ainsi, sont couverts à 100 % :

  • les soins de ville (consultations médicales, radiographies, examens de laboratoire, etc.) ; Ainsi, la consultation d’un médecin généraliste de secteur 1, facturée 26,5 €, est prise en charge dans
  • le droit commun à hauteur de 18,6 € par l’assurance maladie, mais à hauteur de 26,5 € pour une victime d’AT-MP ;
  • l'hospitalisation : le forfait journalier, habituellement dû par l’assuré pour chaque journée d'hospitalisation, et d’un montant de 20 € par jour, est pris en charge en cas d’AT-MP ;
  • les transports sanitaires médicalement justifiés.

Sont couverts à 150 % :

  • les prothèses dentaires ;
  • certains produits d'appareillage comme les fauteuils roulants ou le petit appareillage orthopédique, dès lors qu’ils sont médicalement justifiés, liés à la nécessité de votre traitement et sont inscrits sur une liste de produits et prestations.

Des indemnités journalières plus favorables

Les indemnités journalières sont plus favorables à l’assuré, à plusieurs titres :

  • En montant en droit commun, l’indemnité journalière est calculée sur 50 % du gain journalier de base. En AT-MP, le calcul intègre 60 % du salaire journalier de base pendant les 28 premiers jours et 80 % au-delà (cf. graphique 1). Parmi les IJ versées en 2022, 82 % l’étaient au taux de 80 %, 14 % au taux de 60 % et 4 % IJ étaient versées au titre de la reprise en travail aménagé ou à temps partiel ;
  • En durée : l’assurance maladie verse au maximum 12 mois d'IJ par période de 3 ans consécutifs. Dans le cadre d’une prise en charge en AT-MP, le versement des IJ est prolongé jusqu’à consolidation de la situation de la personne ;
  • En matière de prélèvements sociaux et de fiscalité : alors que les IJ maladie sont soumises à la contribution sociale généralisée (taux réduit à 8,3 %), à la contribution pour le remboursement de la dette sociale et à l’impôt sur le revenu (CRDS - 0,5 % sauf en cas d’affections longues durées), les IJ AT-MP sont soumises au taux de 6,2 % de CSG, 0,5 % de CRDS et fiscalisées à 50 % ;
  • Les conditions d’accès aux IJ sont également plus favorables dans le cadre d’une prise en charge en AT-MP, en particulier, il n’est pas exigé d’ancienneté de cotisation.

Graphique 1 ● Répartition des indemnités journalières par types

Source : Rapport annuel 2022 de l'Assurance Maladie - Risques professionnels, Direction des risques professionnels (DRP) 
Note : le complément à 100 % est à imputer à l’ITI 

En AT-MP des rentes peuvent être versées pour de faibles taux d’incapacité permanente

Aussi, comme préconisé par la commission de sous-déclaration qui a rendu son rapport en 2021, l’orientation vers la pension d’invalidité ou la rente AT-MP nécessite un examen détaillé de la situation de chaque assuré. Les principales différences sont les suivantes :

  • Evaluation de l’incapacité : la pension d’invalidité est ouverte aux personnes dont la capacité de travail est réduite d’au moins deux tiers du fait d’un accident ou d’une maladie d’origine non professionnelle. L’évaluation en AT-MP est fonction d’un ensemble de critères définis par la loi, non liés uniquement aux conséquences professionnelles, permettant d’établir un taux d’incapacité permanente (IP) ;
  • Versement de rentes : en AT-MP, des rentes dites « en capital » sont versées lorsque le taux d’incapacité est évalué entre 1 % et 9 %. Une rente viagère est versée à partir d’un taux de 10 %. Le montant de la pension d’invalidité dépend quant à lui de la catégorie d’invalidité de l’assuré, selon qu’il est absolument incapable ou non d’exercer une activité professionnelle. En toute hypothèse, l’art. L. 434-2 du CSS prévoit que la rente est portée au niveau de la pension d’invalidité si jamais elle devait être inférieure.
  • Revenu de référence : la pension d’invalidité s’appuie sur la moyenne des dix meilleures années, la rente AT-MP sur le salaire des douze derniers mois ;
  • Montants versés : la pension d’invalidité est soumise à des montants minimaux et maximaux (variables en fonction des catégories d’invalidité), alors que, dans le cadre de la rente AT-MP, le salaire annuel pris en compte est au moins égal au salaire minimal des rentes. Le salaire est ensuite pris en compte de manière dégressive, dans la limite de 8 fois le salaire minimal des rentes ;
  • Durée de perception : le versement de la pension d’invalidité cesse lorsque l’assuré bénéficie de ses droits à retraite, alors que la rente AT-MP présente un caractère viager, elle se cumule donc avec la pension de retraite ;
  • Droits à retraite : les titulaires d’une rente AT-MP bénéficient d’un dispositif de départ anticipé à la retraite à taux plein :
    • soit à 60 ans, pour les bénéficiaires d’une rente AT, lorsque leur taux d’incapacité est au moins égal à 20 % et à la condition que les lésions soient identiques à celles indemnisées au titre d’une maladie professionnelle pour les IP consécutives à un AT,
    • soit deux ans avant l’âge légal, lorsque le taux est compris entre 10 % et 19 % sous certaines conditions. Le taux plein automatique est accordé aux bénéficiaires d’une pension d’invalidité à l’âge légal ;
  • Fiscalité : la pension d’invalidité est soumise à l’impôt sur le revenu, alors que la rente AT-MP en est exonérée. De plus, la pension d’invalidité est soumise aux prélèvements sociaux (CSG, CRDS), contrairement à la rente AT-MP.

Des rentes pour les ayants-droits

En cas de décès de la victime, l’assurance maladie ne prévoit pas le versement de rentes aux ayants-droits, alors que c’est le cas en AT-MP. Les rentes versées aux ayants droits représentent 29 % de l’ensemble des rentes d’incapacité versées selon le rapport de gestion de la CNAM-TS. Ces rentes sont versées dans la limite de 85 % du salaire annuel.
Les ayants droits correspondent d’abord au conjoint, concubin, partenaire de PACS. Ils n’ont besoin d’aucune condition de ressources et pourront percevoir une rente à vie. Parmi les rentes payées aux ayants-droits en 2022, 88 % sont versées au conjoint de l’assuré AT-MP décédé – elles représentent 95% des montants versés. La rente est équivalente à 40 % du salaire de l’assuré décédé. Quand le conjoint, le concubin, le partenaire lié par Pacs atteint 55 ans ou s'il souffre d'une incapacité de travail d'au moins 50 %, le montant de la rente viagère est porté à 60 %* du salaire annuel de l'assur (Rapport de gestion de la CNAM-TS).
Des rentes peuvent être versées aux enfants ou ascendants de l’assuré décédé. Ainsi, 10 % des ayants-droits bénéficiaires d’une rente sont des enfants de victimes d’AT-MP. La rente est fixée à 25 % pour chaque enfant. A partir de 3 enfants la rente est fixée à 20 %. En cas d’enfant âgé de moins de 20 ans, la rente est de 30 % ; elle est, après 20 ans, récupérée par le conjoint survivant.

Organisme responsable de la production de l’indicateur : DSS

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