Dispositifs spécifiques
Le compte professionnel de prévention (C2P) permet à des salariés du régime général et du régime agricole, exposés à des facteurs de risques professionnels déterminés au-delà de seuils, d’ouvrir des droits à formation professionnelle, à temps partiel sans perte de rémunération et/ou à une majoration de durée d’assurance. Depuis le 1er octobre 2017, le C2P remplace le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) afin d’en faciliter l’application effective par les employeurs.
Le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) a été instauré par la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite. Sa gestion était confiée à la branche vieillesse. Son fonctionnement repose sur le cumul de points par les salariés relevant des régimes général et agricole en fonction de leur exposition à une liste de risques professionnels. Le périmètre du C3P incluait alors 10 critères de pénibilité (voir précisions méthodologiques). L’acquisition des points sur le compte était assurée par une déclaration annuelle par les employeurs de l’exposition de leurs salariés, au moyen d’une fiche individuelle d’exposition.
Les modalités d’utilisation des points n’ont pas évolué depuis 2014, ainsi, les droits liés au compte sont utilisables jusqu’à la liquidation de la pension de retraite du salarié ou l’utilisation du nombre total de points susceptible d’être accordé. Un trimestre d’exposition à un critère équivaut à un point. Le nombre de points est doublé si le salarié est poly-exposé, c’est-à-dire exposé à 2 facteurs de risques professionnels ou plus. Le nombre de points acquis ne peut excéder 100 points au cours de la carrière. Par ailleurs, les points des salariés exposés nés avant le 1er juillet 1956 sont doublés. L’utilisation des points peut prendre les formes suivantes : formation professionnelle, passage à temps partiel sans perte de rémunération et/ou majoration de durée d’assurance pour le calcul de la pension de retraite (cf. schéma 1).
Lors de sa mise en place, le dispositif était financé par deux cotisations employeur alimentant le fonds chargé du financement des droits liés au compte personnel de prévention de la pénibilité. Une cotisation de base était appliquée aux rémunérations de tous les salariés éligibles au C3P quelle que soit l’effectivité de leur exposition aux facteurs de pénibilité. De plus, une cotisation additionnelle était appliquée aux rémunérations des seuls salariés exposés à la pénibilité avec un taux doublé en cas d’exposition à plusieurs critères.
La concertation avec les partenaires sociaux dans le cadre de la préparation des décrets d’application de la loi du 20 janvier 2014, a montré la complexité pour les entreprises, notamment les PME / TPE, d’évaluer l’exposition aux facteurs de risques professionnels. Aussi, seuls 4 des 10 facteurs sont entrés en vigueur dès le début 2015 (travail de nuit, travail répétitif, travail en équipes alternantes et milieu hyperbare) afin de faciliter l’appropriation du dispositif par les employeurs, les 6 autres étant intégrés à partir de juillet 2016. En outre, la fiche individuelle qui retraçait sur la carrière l’exposition du salarié a été supprimée par la loi du 17 août 2015. La déclaration de l’exposition est, depuis, réalisée via la déclaration annuelle des données sociales (DADS) puis la déclaration sociale nominative (DSN) suite à sa généralisation.
Depuis 2017, le nombre de facteurs de risques professionnels permettant une ouverture de droits est réduit à 6 : travail de nuit, répétitif, en équipes successives alternantes, en milieu hyperbare, températures extrêmes et bruit.
En parallèle, l’ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la prévention et à la prise en compte des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels et au compte professionnel de prévention, a élargi le dispositif de départ en retraite anticipée pour incapacité permanente mis en place par la loi du 9 novembre 2010. Ainsi, la condition de durée d’exposition de 17 ans requise pour les personnes dont le taux d’incapacité permanente est compris entre 10 et 19 % est supprimée pour les maladies professionnelles liées aux 4 facteurs de risques sortis du périmètre du compte.
La gestion du C2P a quant à elle été confiée à la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Le financement du C2P est désormais assuré, comme le dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente, par les employeurs via la majoration forfaitaire pour départs anticipés en retraite pour pénibilité du travail (M4 au régime général, cf. indicateur 2.4) entrant dans le calcul du taux de cotisations ATMP. Cette majoration est calculée en fonction des dépenses prévisionnelles, inscrites en LFSS, liées au C2P et au dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente.
Le nombre de salariés pour lesquels au moins une exposition a été déclarée depuis le 1er janvier 2015 est passé d’environ 0,6 million fin 2015 à près de 1,9 million fin 2021. Si la déclaration d’une exposition donne systématiquement lieu à l’ouverture du compte professionnel de prévention, elle n’entraîne pas nécessairement l’octroi de points. 85% des comptes professionnels de prévention ouverts sont crédités d’un point au moins. Depuis 2015, le travail de nuit et le travail en équipes successives alternantes sont les deux facteurs qui ont engendré le plus d’ouvertures de comptes.
En 2021, environ 637 000 salariés ont été déclarés exposés à un facteur de pénibilité, dont 9 % le sont à au moins deux facteurs de pénibilité différents parmi les 6 risques d’expositions en vigueur. 44 % des salariés déclarés exposés en 2021 l’ont été au titre du travail de nuit et 37 % au titre du travail en équipes successives alternantes. Le travail répétitif a concerné 13 % des exposés en 2021, l’exposition au bruit 10 % et l’exposition aux températures extrêmes 7 % .
Les hommes représentent trois quart des salariés déclarés exposés à la pénibilité. En 2019, la moitié d’entre eux travaillait dans le secteur de l'industrie manufacturière. Les secteurs des "activités de services administratifs et de soutien" et des "transports et entreposage" représentent chacun 15 % des hommes exposés.
Le secteur de l'industrie manufacturière recense également le plus d'exposées à la pénibilité parmi les femmes (un tiers). Le secteur de la "santé humaine et action sociale" représente quant à lui un peu plus d'un quart des femmes exposées et celui des "activités de services administratifs et de soutien" environ 15 %.
A fin 2021, en cumul depuis la création du dispositif, 13 600 salariés ont demandé des conversions de points. Pour 9 600 salariés, il s’agissait d’une demande de majoration de durée d’assurance au titre de la pénibilité, pour 2 600 de temps partiel, et pour 1 500 de formation. La somme des salariés ayant demandé des conversions de points par type de demande est supérieure au nombre total de salarié ayant fait au moins une demande car certains salariés ont fait des demandes de plusieurs types.
Schéma 1 ● Fonctionnement du C2P
Source : CNAV, SIPP mai 2022.
Note : cumul 2015-2021.
Graphique 1 ● Personnes avec au moins une exposition validée depuis 2015
Source : CNAV, SIPP mai 2022.
Note : chiffres en cumul en fin d’année
Source des données : système d’information de la Cnav dédié au suivi du compte professionnel de prévention.
Construction de l’indicateur : le nombre cumulé d’individus pour lesquels au moins une exposition aux facteurs de risques professionnels ouvrant droit au compte (mais pas forcément à l’octroi de points) a été déclarée par un employeur.
Précisions juridiques :
La loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraite avait instauré 10 critères d’exposition : travail de nuit, travail en équipes successives alternantes, travail répétitif, bruit, activités exercées en milieu hyperbare, température extrêmes, manutentions manuelles de charges, postures pénibles, vibrations mécaniques et exposition à des agents chimiques dangereux. Le tableau ci-dessous présente les seuils associés et les périodes pendant lesquelles ces critères ont été mis en vigueur.
Organisme responsable de la production de l’indicateur : DSS